Intervention de Emeric Salmon

Séance en hémicycle du jeudi 27 octobre 2022 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2023 — Défense ; anciens combattants mémoire et liens avec la nation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmeric Salmon, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Le budget opérationnel de la défense se compose de deux programmes de la mission "Défense " : le programme 178, qui regroupe les crédits de préparation, de maintien en condition opérationnelle (MCO) et d'emploi des forces, et le programme 212, qui rassemble les fonctions transverses de direction et de soutien mutualisé du ministère des armées, et qui comprend en particulier les crédits relatifs au personnel et à la condition militaire.

Pour la cinquième année consécutive, les crédits de la mission "Défense " sont conformes à la trajectoire de remontée en puissance définie par la loi de programmation militaire pour les années 2019 à 2025. Notons que cette dernière ne fait que suivre une trajectoire légitime de rattrapage mettant fin à une politique d'austérité pour nos armées, qui ont subi une terrible baisse de leurs moyens financiers due en partie à la révision générale des politiques publiques (RGPP). Le budget 2023 est ambitieux en matière de politique de défense, mais insuffisant au vu de la gravité des menaces qui pèsent sur notre nation, et je vous invite d'ores et déjà à vous abstenir sur les crédits des programmes 178 et 212.

L'année 2023 enregistrera la première augmentation de 3 milliards d'euros prévue par la LPM, portant le budget de la défense à 43,8 milliards d'euros. Ce budget pour 2023 témoigne ainsi de l'effort de la nation au profit de son armée, dans un contexte sécuritaire instable. S'il faut saluer un tel effort, il conviendra que nous restions vigilants quant à la poursuite et à l'accélération de cette trajectoire, dans le cadre de l'élaboration de la nouvelle loi de programmation militaire 2024-2030. À ce titre, nous souhaitons une nette augmentation des moyens de nos armées, afin de porter leur budget annuel à 55 milliards d'euros d'ici à 2027.

Dans le périmètre de mon rapport spécial, les autorisations d'engagement sont en retrait de 9,7 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022. Cette réduction est en cohérence avec le positionnement de l'année 2023 au sein de la programmation. À l'inverse, les crédits de paiement croissent de 7,6 % en 2023, ce qui traduit notamment la poursuite de l'effort en matière de MCO.

S'agissant du programme 178, je souhaite rappeler qu'il est désormais impératif de disposer d'armées préparées et d'équipements opérationnels. La menace de la haute intensité est réelle et nous ne devons pas faiblir dans la préparation de nos armées. Au cours des auditions que j'ai menées, j'ai fait preuve d'une vigilance particulière à l'égard de la disponibilité des matériels et des troupes dont dispose chaque armée. J'appelle particulièrement votre attention sur les problèmes de disponibilité des munitions de petit calibre.

Les crédits alloués au programme 178 sont en augmentation de 1,2 milliard d'euros en 2023. Cette évolution est en rupture avec les budgets précédents, qui prévoyaient que l'augmentation des crédits soit principalement destinée à l'acquisition et à la modernisation des équipements. L'effort budgétaire consenti au titre de ce programme devrait également permettre d'augmenter le temps consacré à l'entraînement sur les matériels majeurs, ce qui me paraît être un point essentiel dans l'hypothèse d'un engagement militaire de grande ampleur. J'ai d'ailleurs eu l'honneur d'assister à l'exercice d'entraînement de l'armée de l'air et de l'espace Volfa – Vol forces aériennes – 2022. C'est en intensifiant la fréquence d'entraînements de ce type, ou de plus importants comme l'exercice Orion – qui se déroulera en 2023 –, que nous pourrons évaluer la capacité de nos armées à résister à un conflit de haute intensité.

La disponibilité des équipements et l'entraînement des troupes, qui sont nettement insuffisants, constituent donc des paramètres essentiels de la remontée en puissance de nos armées. Les hommes et les femmes qui s'engagent sont la ressource la plus précieuse dont nous disposons pour renforcer la résilience de notre nation. Le programme 212 est de ce point de vue un programme essentiel, puisqu'il contient les crédits relatifs au personnel et ceux permettant d'améliorer les conditions de vie et de travail des militaires.

Le PLF pour 2023 s'inscrit dans la trajectoire de remontée des effectifs du ministère, puisqu'il crée 1 502 ETP – équivalents temps plein. Cette hausse des effectifs permettra notamment de renforcer les capacités des armées dans des domaines stratégiques comme le renseignement ou la cyberdéfense. Cependant, cette remontée des effectifs ne doit pas occulter certaines difficultés en matière de fidélisation et de recrutement. Pour continuer de se conformer aux ambitions de la LPM quant au recrutement et à l'acquisition de compétences, il convient de renforcer plusieurs volets de la politique de ressources humaines du ministère.

En premier lieu, le budget 2023 prévoit 101 millions d'euros supplémentaires pour mettre en œuvre la dernière étape de la nouvelle politique de rémunération des militaires. Cette année, quatre nouvelles primes seront créées afin de renforcer l'attractivité des carrières et la fidélisation du personnel. En deuxième lieu, le contrat de concession Ambition logement, conclu en février 2022, permettra la création de 3 000 logements. En dernier lieu, le plan Hébergement, qui vise à améliorer le quotidien des soldats et des cadres, bénéficiera d'un abondement qui permettra de commander 4 318 places supplémentaires.

Vous l'aurez compris, mes chers collègues, je veillerai à l'accélération de la remontée en puissance de nos armées, dont les moyens demeurent, dans le cadre du budget 2023, insuffisants ; c'est pourquoi je vous invite à vous abstenir.

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