La réalité en Guyane, c'est que des soignants suspendus travaillent, car les directeurs d'hôpitaux ne savent pas faire autrement. C'est une inégalité de traitement : de nombreux soignants ont été suspendus et, depuis plus d'un an, ne peuvent pas travailler et se retrouvent sans rémunération. Comment explique-t-on cela dans une république qui se dit égalitaire ? On s'adapte à la situation, mais en piétinant le droit ! Il vaudrait mieux régler le problème en abrogeant une disposition législative qui n'a aucun sens.
D'autant que la Guyane est un désert médical. Les soignants viennent pour six mois et repartent. Comment faire fonctionner un établissement sanitaire ou médico-social avec un tel turnover ? Il n'y a pas de continuité des soins. Régulièrement, mon collègue vient de le dire, des personnes décèdent. Tout cela parce qu'on ne veut pas prendre une décision politique qui ne coûterait rien dans les établissements publics, puisque ces postes sont budgétés.
Monsieur le ministre délégué, vous avez énuméré vos axes de travail – création de valeur ; fierté culturelle ; responsabilisation et différenciation – et fait valoir que les crédits augmentaient de 8 % dans le projet de loi de finances. Comment pouvez-vous nous dire cela ? En Guyane, territoire grand comme le Portugal ou l'Autriche, où la croissance démographique est aussi forte, où les problématiques et les enjeux sont aussi importants, on ne peut pas se contenter de traiter les choses avec des pourcentages !
Vous avez vu ce qui se passe : régulièrement, des personnes se font tuer ; l'insécurité est ingérable ; les pouvoirs régaliens sont en échec total. Nous allons vers une explosion sociale. Celle-ci a d'ailleurs déjà commencé.
À cela s'ajoute l'insécurité énergétique : des centrales qui ne fonctionnent pas ; des milliers de personnes sans électricité pendant plusieurs jours, hier à Maripasoula, aujourd'hui à Grand-Santi ; deux blackouts généraux au mois d'août. Où voit-on cela ? Où allons-nous ? La centrale thermique du Larivot est censée assurer à l'avenir 40 % de la production, mais nous sommes en sursis : nous attendons une décision, de tribunal en tribunal. La construction de cette centrale a été décidée il y a quinze ans !
Mon collègue l'a dit, les gens ne peuvent pas circuler. Il faut ouvrir les grands chantiers, monsieur le ministre délégué ! La Guyane est un grand pays ! Il n'est pas possible d'en rester à la logique du territoire de l'Inini, de mettre sous cloche un territoire de 8,3 millions d'hectares sous des régimes de parc, de réserve ou de Znieff – zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique –, alors qu'il dispose de nombreuses ressources, notamment minières, halieutiques et forestières. Rendez-vous compte que c'est précisément au cœur du parc national que se déroulent les opérations clandestines d'orpaillage, le pillage de nos ressources aurifères !
En fait, on marche à l'envers depuis près de trente ans ! Je sais que cela ne relève pas uniquement de vous, monsieur le ministre délégué. Il faut que le Président de la République lui-même prenne la mesure du problème.
Autre exemple : comme la Guyane ne dispose pas de plateaux techniques sanitaires sur son territoire, on évacue les malades à l'extérieur, ce qui coûte des fortunes, compte tenu du tarif des billets d'avion. Les problèmes se cumulent. Nous en parlerons demain, puisque nous devons nous voir. Les enjeux en Guyane sont immenses : dans dix ou quinze ans, nous arriverons à 500 000 habitants, et il faudra bientôt se placer dans la perspective d'une population de 1 million d'habitants sur un territoire comme le nôtre.