Le budget de l'aide publique au développement augmentera l'année prochaine de 800 millions, ce dont nous pourrions nous satisfaire si de nombreux points ne se prêtaient pas à la critique.
S'agissant de l'équilibre entre les prêts et les dons, on constate, comme toujours, que le programme 110, relatif aux prêts, concentre la plus grande partie de l'augmentation budgétaire de l'APD. Or c'est par le programme 209 que les dons et les actions les plus concrètes sont rendus possibles, comme les services sociaux ou les projets des organisations de la société civile et des ONG. Les députés du groupe Gauche démocrate et républicaine ne cessent de dire que l'aide publique au développement doit servir aux États les plus fragiles.
Plusieurs collègues ont déjà parlé de la transparence de l'APD. Le pilotage de cette politique est assuré tous les cinq ans lors d'une réunion du CICID, qui fixe les grandes orientations de l'APD française. Or ce comité exclut les organisations de la société civile, les ONG et même le Parlement. La politique en matière d'APD est décidée par Matignon en lien avec les ministères, ce qui pose un problème de débat démocratique. Nous espérons que le Gouvernement finira par entendre qu'il faut de la transparence et que les décisions ne doivent pas toutes être prises par quelques-uns. Par ailleurs, alors que le CICID se réunissait presque annuellement à une époque, son rythme est devenu quinquennal. Pourquoi ? Un tel rythme nous fait totalement rater l'actualité internationale, dont chacun connaît pourtant l'intensité et la volatilité.
Ainsi, le budget de cette année aurait pu être acceptable s'il n'y avait eu ni inflation, ni guerre en Ukraine, entraînant famine et désorganisation de beaucoup de services. Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a indiqué récemment que 90 % des pays avaient vu cette année leur indice de développement humain reculer, ce qui est extrêmement grave. Si ce budget est intéressant, il ignore que les besoins en matière d'aide publique au développement ont explosé. Le cadre prévu en 2018 par Matignon ne pouvait anticiper ces évolutions. Une instance d'orientation se réunissant plus souvent aurait plus de légitimité.
J'en viens aux efforts budgétaires consentis par les secteurs économiques pour faire avancer l'aide publique au développement. Tous tentent d'y contribuer, sauf un, la finance. Vous refusez obstinément de faire évoluer la taxe sur les transactions financières (TTF) en vous réfugiant derrière une hypothétique TTF européenne. Notre rapporteure pour avis sur le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne nous a dit à ce sujet, à l'occasion de la présentation de son avis budgétaire, qu'il faudrait attendre. Il est grand temps que la France évolue. C'est pourquoi nous proposons de porter de 0,3 à 0,7 % le taux de la taxe française, ce qui permettrait d'ajouter près de 1,5 milliard d'euros à l'aide publique au développement. Nous proposons également d'élargir l'assiette du dispositif, afin que davantage d'entreprises y soient éligibles, et de viser les transactions intrajournalières. Les leviers pour récupérer des fonds existent et il est temps d'arrêter avec votre dogmatisme ultralibéral – en disant cela, ce n'est pas à la rapporteure pour avis que je m'adresse mais à la majorité – et d'assumer de prendre de vraies décisions.
En attendant, les députés du groupe GDR ne seront pas en mesure de voter pour ce budget imaginé avant la crise et qui, par dogmatisme et opacité, n'évolue pas en fonction des urgences d'aujourd'hui.