Il nous faut mesurer les attentes considérables qui pèsent sur notre travail parlementaire. Ces attentes sont fondées sur la crainte légitime de voir le pouvoir d'achat des ménages continuer à s'étioler, du fait d'une inflation galopante et d'un modèle social en panne. En premier lieu, je pense aux territoires les plus violemment frappés par cette crise, et qui étaient déjà confrontés à une situation structurelle dramatique en matière de cherté de la vie : les territoires ruraux, les outre-mer et la Corse. Quelques chiffres valent mieux qu'un long discours : 18 % des personnes en grande précarité vivent dans les départements et régions d'outre-mer, où la grande pauvreté est cinq à quinze fois plus fréquente qu'en métropole.
Une pauvreté plus intense : en Guadeloupe, à la Martinique et à La Réunion, la moitié des personnes en situation de grande pauvreté vit avec moins de 690 euros par mois. En métropole, la Corse elle aussi cumule les difficultés : salaire moyen le plus bas, avec un différentiel de moins 440 euros ; taux de précarité le plus élevé, avec 18,5 % des ménages vivant sous le seuil de pauvreté ; taux de pauvreté des retraités supérieur de 9 points.
La forte dégradation du pouvoir d'achat, accentuée par la flambée des prix du carburant, est encore plus fulgurante pour les territoires insulaires, où la vulnérabilité énergétique liée aux déplacements est trois fois supérieure à celle de l'Hexagone. Pour ces personnes en grande souffrance économique, quelles solutions propose-t-on ? Concrètement, pas grand-chose, puisque aucun des dispositifs prévus n'est adapté aux spécificités des territoires les plus en difficulté.
Au moment où va s'ouvrir le processus entre Paris et la Corse pour décider de l'avenir institutionnel de l'île, le traitement d'une question aussi cruciale que le pouvoir d'achat est symptomatique d'une logique jacobine et centralisatrice…