Personne, dans cet hémicycle, ne peut imaginer rivaliser avec les trente ans de longévité de notre collègue Charles de Courson, qu'il aime tant nous rappeler au fil de nos séances nocturnes budgétaires. Toutefois, permettez-moi de me réjouir modestement, car c'est tout de même la sixième année consécutive que je m'exprime, à cette tribune, sur le sujet de la contribution française au budget européen. Ce débat est particulier. Il constitue l'une des très rares occasions de discuter, dans cet hémicycle, des questions européennes, pourtant fondamentales. Le débat d'aujourd'hui est donc salutaire, mais il est insuffisant.
Il est insuffisant eu égard aux enjeux : ils portent sur un immense corpus de politiques publiques – agriculture, recherche, industrie – qui affectent nos concitoyens au quotidien.
Il est aussi insuffisant eu égard à la nature de l'exercice auquel nous nous prêtons chaque année dans le cadre de l'examen de cet article du projet de loi de finances : nous nous contentons d'écouter une succession d'interventions portant sur un objet unique, le PSR-UE, au lieu d'engager un véritable échange sur son utilisation et sur les bénéfices indirects qu'il concourt à financer pour la prospérité et la sécurité de notre société.
Prenons le temps de regarder ce qui s'est passé ces deux dernières années : face à la pire récession que l'on ait connue depuis un siècle et à l'initiative de la France, un plan de relance de plusieurs centaines de milliards d'euros a été adopté et mis en œuvre par l'Union, financé par un endettement commun, chose inimaginable il y a seulement quelques années. Face aux grandes transformations – climatique, numérique, énergétique et financière – auxquelles nos compatriotes sont confrontés, c'est en agissant en Européens que nous pouvons infléchir le cours de l'histoire, exercer une réelle souveraineté et protéger notre modèle. C'est pour cette raison que notre pays est et continuera d'être un bâtisseur de l'Union, et c'est pour cette raison que nous finançons cette construction que nos aïeux ont fondée pour préserver la paix.
Aux deux extrémités de l'hémicycle se retrouve la même volonté de faire croire à nos compatriotes que leurs doléances ont une source unique, l'Union européenne. C'est un fonds de commerce qui ne se dilue jamais. On omet de préciser qu'au sein de cette même Union coexistent vingt-sept pays et autant de sociétés parmi les plus protectrices au monde ; vingt-sept nations aux modèles économiques et organisationnels différents et, pourtant, pareillement soumises aux règles que nous nous sommes collectivement et démocratiquement imposées pour mieux prospérer ensemble. À ceux qui, sans cesse, se contorsionnent en lamentations au sujet du cadre budgétaire européen, je rappelle que trois des quatre pays les plus égalitaires au monde y sont également soumis et qu'ils réussissent à dégager régulièrement des excédents budgétaires en arborant des taux d'endettement deux à quatre fois moins élevés que celui de notre pays.
À ceux qui montent à cette tribune chaque année pour ressasser le syllogisme absurde que, notre contribution à l'Union étant plus importante que les transferts que nous en recevons, notre pays est forcément perdant, je rappelle que le principe même de la mutualisation sous-entend que les bénéfices induits sont supérieurs à la somme des contributions individuelles.