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Intervention de Christine Arrighi

Réunion du mercredi 29 mai 2024 à 15h30
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Arrighi, rapporteure :

Monsieur le président, je salue votre ouverture d'esprit. Cependant, de nombreuses questions posées ne relèvent pas du cadre juridique et financier du contrat de concession. Je fais référence aux interrogations de madame Vignon et d'autres intervenants, ainsi qu'à certaines réponses apportées. Je vous en remercie, car ce n'est pas courant, et j'en prends acte. Pour une meilleure visibilité du compte rendu, j'aurais préféré que les interventions se fassent successivement, car cela facilite la tâche de ceux qui les rédigent.

Monsieur Ducournau, bien que vous ayez été interrogé en dernier, vous avez été le premier à intervenir. J'ai plusieurs remarques et questions à formuler. Vous avez souligné l'esprit pionnier de monsieur Pierre Fabre en matière d'environnement et de cosmétiques. Toutefois, monsieur Fabre est décédé en 2013, et nous sommes en 2024. Entre ces deux dates, de nombreux scientifiques ont émis des alertes, et plusieurs rapports du GIEC ont été publiés. Je m'interroge sur la situation actuelle concernant l'autoroute A69, qui longe une route nationale, et qui obligera ainsi l'usager à payer. À la suite du covid et du développement du télétravail, je ne suis pas convaincue que monsieur Fabre, s'il était encore parmi nous, aurait approuvé l'autoroute A69 dans les conditions actuelles, notamment en termes d'atteinte à la biodiversité et des enjeux environnementaux. Je ne peux évidemment pas parler en son nom, mais je fais cette remarque en 2024, en tenant compte des rapports du GIEC, des alertes des scientifiques et des dossiers comme celui-ci. Nous devons être conscients de l'impact environnemental de nos infrastructures et privilégier les mobilités décarbonées. En termes de rapport qualité-prix, tant pour le bilan carbone que pour le coût pour le passager, le train reste la meilleure option.

En matière de transport ferroviaire, il est avéré qu'aucune étude alternative concernant le train n'a été réalisée. Ni lors de la déclaration d'utilité publique, ni au moment de l'autorisation environnementale, aucune analyse économique, scientifique ou sociologique n'a été menée. Nous constatons donc l'absence d'une telle alternative. Vous mentionnez également que de nombreuses entreprises soutiennent le projet de l'autoroute A69. Connaissant bien ce territoire, je confirme que plusieurs entreprises souhaitent pouvoir se déplacer rapidement d'un point à un autre, surtout lorsque cela est gratuit.

Aujourd'hui, avez-vous des éléments que vous avez pu communiquer aux cadres de votre entreprise, sachant qu'en dehors de leur travail chez Fabre, ils sont des citoyens comme vous et moi, et donc ils vont payer une infrastructure, et doublement, puisqu'ils sont également contribuables dans le Tarn ? Vous nous indiquez que 1 200 entreprises avaient approuvé cette autoroute. Or, le Tarn comptait 36 694 entreprises en 2019. Cela permet de mesurer la proportion de celles qui se sont déclarées enthousiastes ou favorables par rapport à l'ensemble des entreprises, notamment des artisans qui s'interrogent et s'inquiètent aujourd'hui sur le coût des péages. Avez-vous une idée de l'impact financier pour les cadres qui se rendront à Toulouse ? Combien cela va-t-il peser sur vos charges d'entreprise, sachant que vous devrez assumer le coût du péage en plus de l'usure des véhicules ou du coût des voitures de service ? Avez-vous déjà effectué cette évaluation ? Avez-vous une idée des tarifs ? Pour être franc, je ne l'ai pas, car nous avons encore aujourd'hui envoyé un courrier au ministère pour demander des précisions sur cette question qui nous préoccupe. En effet, au-delà de la question environnementale, il y a évidemment la question du coût. On ne peut pas parler d'environnement sans aborder la question sociale, notamment celle des tarifs. Pour une entreprise, qu'il s'agisse de véhicules particuliers ou de camions, nous disposons de très peu d'éléments, hormis des informations lacunaires présentes dans les documents. On nous indique que les prix pour les voitures seront inférieurs de 7 % à la moyenne constatée sur d'autres autoroutes, tandis que pour les classes 4, c'est-à-dire les camions, ils augmenteront de 14 % voire 15 %. Cependant, comme nous ne connaissons pas les taux plafonds, nous ne pouvons que faire des estimations conditionnelles : 20 euros pour les véhicules, 26 euros pour les artisans et 60 euros pour les camions. Il s'agit d'un calcul approximatif. Combien de charges pensez-vous devoir acquitter pour des allers-retours à Toulouse ? Combien de cadres utilisent actuellement la route gratuite pour se rendre à Toulouse ?

Sur les mesures compensatoires, vous admettez ne pas en avoir une idée précise. Je le comprends, car nous-mêmes n'avons pas de certitude à ce sujet. Ce sera une question pour monsieur Gerlinger, qui attend patiemment. Actuellement, des comités de suivi sont mis en place pour l'application du contrat. Initialement prévu une fois par an, le préfet Durand nous a récemment informés qu'il y en aurait deux, compte tenu de l'actualité. Je ne sais pas si cela a déjà été instauré, mais il y aura un comité de suivi annuel où seront abordées les mesures compensatoires. Jusqu'à présent, lors de ces réunions, il n'a jamais été question des délaissés, ce qui soulève des interrogations par rapport à l'autorisation environnementale.

Monsieur Ducournau, vous avez évoqué votre participation à Tarn Sud Développement et vous avez raison. Rien de tout cela n'est illégal, puisque tout est inscrit dans le contrat. Heureusement que tout est écrit dans le contrat, sinon nous serions dans une situation juridique différente. Toutefois, le véritable sujet dans cette affaire est que vous nous fournissez une explication du type « nous ne voulions pas le dire parce que nous observons ce qui se passe sur le chantier ».

Je dénonce et condamne fermement toutes les exactions commises sur ce chantier, en particulier celles visant les travailleurs. Ces personnes méritent notre protection. J'interpellerai à nouveau monsieur Darmanin, comme je l'ai déjà fait lors d'une question au Gouvernement, pour lui demander que les forces de police et de gendarmerie, présentes sur place même la nuit pour protéger les salariés, interpellent les casseurs. Il est inconcevable que ces forces ne puissent pas appréhender ceux qui jettent des pierres sur le chantier. Je suis convaincu qu'elles en ont les capacités, plutôt que de dresser des procès-verbaux à l'encontre de militants pacifiques, convoqués demain devant le tribunal de Castres.

Monsieur Ducournau, concernant les manœuvres sur la prise de participation, vous affirmez que c'était par crainte. Cependant, au moment de la rédaction du contrat, le chantier n'avait même pas commencé. Je ne vois pas ce qu'il y avait à craindre, puisque aucune exaction n'avait eu lieu. Votre argument m'intrigue, d'autant plus que d'autres personnes à qui j'ai posé la même question m'ont indiqué que le secret des affaires couvrait cette situation parce qu'au moment de la conclusion du contrat, tout le monde, y compris le groupe Fabre, n'était pas complètement prêt à participer à hauteur de 8 800 000 euros. Ainsi, dans le contrat, la société Opale Invest figure avec un capital de 10 000 euros, ce montant n'ayant été porté à 8 600 000 euros que bien plus tardivement.

En examinant ce sujet de manière approfondie, j'ai découvert un document provenant de TIIC et Atosca. Ce document, rédigé en anglais par Quaero mentionne des négociations à venir entre l'État, Atosca et d'autres partenaires concernant certains éléments relatifs à la cherté et au taux d'inflation. Ces informations se trouvent dans les comptes de TIIC au 31 décembre 2022. Sur cette prise de participation, expliquez-moi pourquoi l'avoir dissimulée alors que le groupe Fabre, depuis de nombreuses années, se déclare favorable à cette liaison autoroutière. Nous ne pouvons pas élargir la RN126, faute de fonds disponibles, c'est la réponse qui a été donnée. Pourquoi ne pas avoir révélé cette participation ? Je ne comprends pas. Pourquoi l'avoir couverte par le secret des affaires ? Je ne comprends pas. Pourquoi vous étonner que des suspicions puissent émerger concernant votre groupe et d'autres, étant donné que l'on cache quelque chose que, a priori, vous revendiquez pour une implication territoriale, pour défendre ce territoire ? Cette entreprise, installée dans ce territoire, s'inscrit dans son histoire, et nous nous félicitons de sa présence. Pourquoi avoir caché cela ? C'est ma première question. Ma deuxième question sera adressée plus tard à monsieur Gerlinger et monsieur Roux.

Si je comprends vos propos, vous me confirmez bien que finalement vous ne participerez pas à la joint-venture avec Gaïa Energy et Atosca ?

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