Intervention de Martial Gerlinger

Réunion du mercredi 29 mai 2024 à 15h30
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Martial Gerlinger, directeur général d'Atosca :

Je ne vais pas prononcer de propos liminaires, ayant eu l'occasion de le faire lors de mon audition le 4 avril dernier, où j'ai présenté les enjeux, le contexte et la motivation d'associer Atosca à ce projet. J'ai également eu l'occasion de vous rencontrer lors de votre visite sur place, où vous avez pu constater l'avancée du chantier. Je vais simplement évoquer l'actualité du chantier pour nos agents. Au-delà des engins incendiés, dont une dizaine à ce jour, ce qui est déjà très grave, je suis particulièrement préoccupé par la situation de mon personnel, qui accomplit son travail quotidiennement. Il y a deux jours, un travail a été réalisé pour la déviation de la RN126 en vue de la construction de l'ouvrage de franchissement de l'autoroute au niveau de Saïx. Ce personnel a travaillé toute la nuit jusqu'à cinq heures du matin sous des jets de projectiles, des billes lancées avec des frondes, et des lasers dirigés vers leurs yeux. Cette situation est inacceptable, et je prendrai les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de mon personnel.

Je vais maintenant répondre aux différentes questions, de la dix-neuf à la vingt-cinq, en reprenant pour l'essentiel ce qui a déjà été évoqué par d'autres intervenants. Première question sur la genèse du projet : « Atosca avait-elle l'intention, avant la signature de la convention de concession, de produire de l'électricité photovoltaïque sur les délaissés de l'autoroute ? » La réponse est affirmative. Vous l'avez déjà entendu de mes actionnaires, de mon président, et de monsieur Roux à l'instant. Nous avons effectivement anticipé dès la phase d'offres, bien avant la création d'Atosca, qui n'a été fondée qu'à la veille de la signature du contrat de concession. Le groupement candidat, lors de l'élaboration de son offre, avait déjà envisagé l'opportunité d'utiliser les zones non utiles pour l'autoroute en tant que telle, ni pour des mesures compensatoires, afin d'y implanter des centrales photovoltaïques. L'objectif était de produire de l'énergie utilisable à la fois pour l'entreprise, dans l'exploitation de l'autoroute, et pour alimenter la consommation électrique des véhicules circulant sur l'autoroute à terme.

Nous avons anticipé que, d'ici quinze à vingt ans, l'essentiel des véhicules circulant sur l'autoroute sera électrique. Nous avons identifié que sur les 40 hectares potentiels, une estimation haute, cela serait suffisant pour produire l'électricité nécessaire à l'alimentation de l'ensemble des véhicules, atteignant ainsi la neutralité énergétique pour cette route. J'ai déjà évoqué le travail réalisé en matière de transitions énergétiques, notamment sur les bornes électriques, les aires de covoiturage, le flux libre, et la politique tarifaire favorable aux véhicules électriques. Ce complément permet d'avoir une vision globale de ce qui peut être fait sur l'autoroute pour décarboner la mobilité sur cette infrastructure. Nous avons eu des discussions exploratoires avec la société Gaïa, qui nous a présenté son travail à ce sujet. Nous avons intégré cette identification dès le départ.

Question numéro vingt : « NGE Concessions produit-elle déjà de l'électricité d'origine photovoltaïque ou éolienne sur des délaissés d'autoroute, ou gère-t-elle déjà la concession ? A-t-elle une expérience en la matière ? » En tant que dirigeant d'anciennes sociétés d'autoroutes normandes, l'A88 et l'A150, où NGE Concessions est partie prenante, je peux confirmer que tel est le cas sur ces autoroutes, bien que dans une configuration différente, car les choses ont été envisagées alors qu'elles étaient déjà en exploitation. L'avantage pour l'A69 est que nous pouvons anticiper, avant même la finalisation des travaux, comment effectuer les réservations de terrains pour ensuite mettre en place ce type de centrale photovoltaïque. Cela nous a semblé cohérent de procéder ainsi, sur la base des expériences déjà acquises dans les processus de mise en place de centrales photovoltaïques.

Sur la question numéro vingt et un concernant la proximité entre NGE Atosca et Gaïa Energy, monsieur Roux a déjà apporté une réponse. Atosca, en tant que tel, n'entretient pas de lien direct avec Gaïa. NGE ne possède pas de lien capitalistique avec Gaïa, mais il existe des proximités au niveau des dirigeants. C'est cette proximité qui nous a conduits à collaborer sur certains projets d'énergie renouvelable. Actuellement, des réflexions sont en cours sur des projets portés par Gaïa sur les sites de NGE.

La question vingt-deux semble être à l'origine de ma présence aujourd'hui ; elle porte sur le fait qu'Atosca, en lien avec Gaïa, ait souhaité rencontrer récemment quelques maires et présidents de communautés de communes. En effet, comme l'a indiqué Gaïa, nous avons jugé important, dans la phase de concertation et d'élaboration de ce projet, d'engager des discussions exploratoires avec les maires. Cet état d'esprit nous motive de manière générale dans la conduite et l'avancement de ce projet. Nous souhaitons travailler avec les territoires, établir des points d'échange, et prendre en compte les remarques formulées. Ainsi, fin mars et début avril, nous avons rencontré deux communautés de communes et sept à huit communes, identifiées avec Gaïa comme présentant un potentiel pour l'implantation de centrales photovoltaïques. Les retours ont été globalement favorables. Les communes ont accueilli positivement l'opportunité de travailler sur ce type de centrale. Certaines ont émis des remarques complémentaires, que nous intégrerons dans la suite du projet.

En outre, je tiens à souligner le travail accompli au niveau du comité de développement, au-delà des avis des maires directement concernés. Le comité de développement (Codev), dont vous avez déjà entendu parler au sein de la commission, a travaillé sur la coordination de toutes les politiques publiques à l'échelle de ce territoire pour maximiser les bénéfices de l'arrivée de l'autoroute et mettre en synergie le maximum de politiques publiques. Un des groupes de travail, qui s'est penché sur l'utilisation des terrains autour de l'autoroute, a suggéré des réflexions sur le photovoltaïque, sans notre présence. Cela répond bien à la demande du territoire de travailler dans cette direction.

Des réponses ont déjà été apportées à la question vingt-trois, sur l'autorisation environnementale, mais je vais les préciser. Effectivement, dans l'autorisation environnementale relative à l'autoroute, madame la rapporteure demandait si nous avions communiqué cette information à l'Autorité environnementale à l'époque. À ce moment-là, nous n'avions pas encore une connaissance précise d'un projet photovoltaïque. Nous avions des intentions, mais le projet n'était pas encore défini. Plusieurs éléments doivent être pris en compte avant de finaliser un tel projet, comme la disponibilité foncière et l'accord des élus et des riverains. Le projet n'était donc pas encore suffisamment avancé pour être évoqué de manière précise. Nous avons simplement mentionné, dans le dossier de demande d'autorisation environnementale, qu'il y avait des réflexions sur la production d'énergie photovoltaïque le long de l'autoroute. Nous n'avons pas dissimulé ces réflexions, elles figurent dans le dossier. L'articulation avec ce deuxième projet, porté par un autre acteur, Atosca, qui ne sera pas impliqué dans la société réalisant les centrales photovoltaïques, sera instruite dans une deuxième demande d'autorisation environnementale, accompagnée de demandes de permis de construire. Ces démarches ne sont pas encore finalisées, et nous ne pouvons pas encore préciser la date de dépôt. Cela nécessitera encore du temps, et je répondrai à la question sur le planning ultérieurement. Madame la rapporteure, vous avez évoqué à plusieurs reprises l'articulation avec la mesure compensatoire de désartificialisation des délaissés d'infrastructures, prévue dans l'autorisation environnementale. Cela ne concerne pas l'ensemble des délaissés, y compris les délaissés verts autour de l'autoroute, mais bien les délaissés d'infrastructures.

Pour l'essentiel, les déviations de Soual et de Puylaurens ne sont pas nécessaires pour la réalisation de l'autoroute. En effet, l'autoroute se raccorde quelques centaines de mètres plus loin en raison de la configuration géographique. Ainsi, plusieurs hectares de terrain actuellement artificialisés et déchaussés de ces déviations pourront être désartificialisés et rendus à la nature. Nous travaillons également sur des continuités hydrauliques, notamment dans la vallée du Girou, qui est concernée par la déviation de Puylaurens. Aucun projet n'est prévu sur ces zones.

Ni Pierre Fabre ni Atosca ne feront partie de la structure de portage des panneaux photovoltaïques, dont le développeur sera Gaïa si le projet se concrétise. La configuration juridique de l'opération est la suivante. Atosca est le gestionnaire du domaine public autoroutier concédé dans le cadre de sa mission de réalisation et d'exploitation de l'autoroute. L'État lui a confié la gestion de ce domaine pour une durée de cinquante-cinq ans. Nous avons identifié des zones au sein de ce domaine, qui pourraient être utilisées pour du photovoltaïque. Le montage sera défini lorsque le projet sera suffisamment avancé, que les équilibres auront été trouvés et que toutes les études d'impact nécessaires auront été réalisées. Les dossiers devront également être déposés au ministère des transports. Comme l'a précisé monsieur Balderelli lors de son audition, aucun dossier n'a encore été déposé au ministère des transports, qui est l'autorité concédante et doit valider les utilisations du domaine public autoroutier concédé pour la réalisation d'installations annexes. Cette possibilité nous est offerte dans le cadre du contrat de concession et de l'article 22. Néanmoins, une validation est encore nécessaire sur la base de projets définitifs de l'autorité concédante. À ce jour, aucun dossier n'a été déposé auprès des services instructeurs, et aucune autorisation n'a été accordée par Atosca. Il n'existe aucune autorisation d'occupation temporaire du domaine public autoroutier concédé qu'Atosca pourrait octroyer à la société de projets en charge du photovoltaïque. Tout cela demeure en discussion et nécessite une validation stricte de l'État.

Je précise, en réponse à votre question, madame la rapporteure, sur le montant des redevances qu'Atosca percevrait qu'actuellement, les équilibres financiers de l'opération, les configurations techniques possibles et la complexité de certaines installations ne sont pas encore précisément établis. Cependant, nous connaissons l'ordre de grandeur des recettes potentielles issues des panneaux photovoltaïques. Cela nous a permis d'estimer, de manière approximative, qu'une recette pourrait être générée pour Atosca grâce à ces centrales photovoltaïques, représentant environ 0,3 % de l'ensemble des recettes et du chiffre d'affaires sur la durée de la concession. Ces 0,3 % correspondent à 40 hectares. À ce jour, ce potentiel n'a pas été pleinement identifié dans le cadre du travail effectué sur le DPAC. Des calculs simples permettent d'estimer les recettes espérées. Pour nous, l'enjeu n'est pas tant la recette financière, mais plutôt de veiller à un aménagement équilibré dans le cadre de la transition énergétique de ce territoire et de saisir les opportunités offertes par cette opération.

Enfin, concernant le planning, je répondrai à votre dernière question. Dans l'offre que nous avons déposée, nous avions initialement prévu de mettre en service les panneaux photovoltaïques en même temps que l'autoroute, à la fin de l'année 2025. Cette synchronisation était notre objectif principal. Pourquoi ? Parce qu'il est plus simple de réaliser les travaux photovoltaïques parallèlement à ceux de l'autoroute. En termes d'exploitation, une autoroute en service voit les véhicules circuler sur l'ensemble des voies, notamment la voie lente située souvent en bordure des talus où les panneaux pourraient être installés. Effectuer des travaux alors que l'autoroute est en exploitation s'avère plus complexe. Bien que cela soit réalisable, comme le montrent d'autres autoroutes en France, cela reste néanmoins plus compliqué. Notre souhait était donc de profiter des travaux en cours pour avancer simultanément sur le projet photovoltaïque. Cependant, le contexte actuel de l'opération montre que les discussions sur les libérations foncières, la configuration des terrains, les échanges avec les élus et les services, ainsi que les procédures environnementales à réaliser, rendent cette synchronisation impossible. À ce jour, je ne dispose pas de visibilité précise sur une date de dépôt de dossier, ce qui empêche une mise en service des panneaux photovoltaïques en même temps que celle de l'autoroute. Malgré cela, un de mes actionnaires l'a réaffirmé lors de son audition cette ambition reste forte pour nous. Nous continuerons donc à travailler sur ce projet afin de progresser.

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