Il existe une sorte de fantasme autour du pouvoir d'un directeur de casting. Autrefois, il n'y en avait qu'un, puis cinq. La carrière d'un comédien pouvait alors dépendre de ces cinq personnes et il était crucial de ne pas se les aliéner. Actuellement, nous sommes plus de cent vingt, ce qui réduit considérablement la pression. Nous avons moins ce pouvoir sur la carrière de quelqu'un. Notre statut devient plus sain, car dès lors que le cinéma et l'audiovisuel sont devenus une industrie par choix politique, il a fallu mobiliser beaucoup plus de personnes pour exercer ce métier. Cela a diminué le pouvoir individuel et assaini les relations professionnelles. Cependant, les conditions de travail se dégradent régulièrement. Un film qui se réalisait en neuf ou dix semaines se tourne désormais en six. Il est impératif de revenir à des conditions normales, car la pression actuelle risque de nous pousser à harceler d'autres personnes, ce qui n'est pas conforme à nos valeurs. La chaîne de production, composée de centaines de personnes sur un plateau, pourrait finir par être contaminée par ce système.
On nous dit parfois « Oh, je trouverai bien quelqu'un qui fera cela pour 500 ou 1 000 euros. » Pour quinze rôles dans une série, la directrice de production finit par demander à sa sœur ou à sa fille de publier des annonces sur Internet, cherchant quelqu'un qui soit capable de monter à cheval pour un rôle important. Nous ne sommes pas respectés dans cette fonction. Dès lors, selon qu'on nous parle d'argent ou d'envie artistique, nous savons si cela se passera bien ou non. C'est véritablement une question de reconnaissance.