Intervention de Jean-Baptiste Djebbari

Réunion du mardi 4 juin 2024 à 10h00
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Jean-Baptiste Djebbari, ancien ministre délégué aux transports :

Je respecte votre raisonnement, bien que je sois en désaccord, et j'essaie simplement de présenter des perspectives différentes.

En ce qui concerne les poids des critères (un quart pour les travaux, un quart pour le trafic et la moitié pour l'ingénierie financière), quelques remarques s'imposent. D'abord, sur la question des carrières, il est nécessaire de mettre à jour le schéma des carrières. Les membres du groupement ont exprimé des observations sur les déblais et remblais. Ils ont semble-t-il trouvé des solutions d'optimisation sur site pour minimiser les déblais et remblayer sur place, ce qui réduit le recours à des matériaux externes à quelques dizaines de milliers de tonnes, loin des 2,6 millions initialement prévus. Ce sujet est très opérationnel. La vie des projets est ainsi faite : parfois, des améliorations et optimisations sont trouvées, parfois des dégradations surviennent. Le transfert des risques, notamment sur les travaux, s'applique pleinement ici, heureusement dans un sens plus écologique au cas présent.

Sur l'alternative gratuite, je comprends parfaitement votre raisonnement. Nous vivons dans une République décentralisée où les compétences sont réparties entre les différents échelons départementaux et régionaux. Chaque échelon assume la charge de ses compétences. L'État, pour sa part, a compensé quasiment à l'euro près les charges de décentralisation en procédant à des dégrèvements sur diverses taxes, notamment la taxe financière. Je pense pouvoir affirmer sereinement que l'État a rempli ses obligations sur ce sujet.

Pour ce qui est des fermes photovoltaïques, ce projet n'était pas caché. La partie grisée, est liée au secret des affaires. En l'occurrence, l'article L. 151-1 du code du commerce utilise une acception particulièrement large du secret des affaires. Peut-être que le législateur reviendra un jour sur cette notion, mais cela relèvera d'une discussion complexe, car c'est la vie économique de la nation qui en serait transformée. Je comprends néanmoins le sujet. En l'occurrence, vous avez eu accès à tous les éléments dégrisés. Si je saisis bien, cet élément revêt une dimension à la fois économique, car il s'agit de recettes, et actionnariale, étant donné qu'il s'agit d'un projet avec des actionnaires ou des partenaires extérieurs qui n'étaient pas encore impliqués à ce moment-là du projet. C'est probablement pourquoi les services ont décidé de griser ces informations. Vous avez eu accès à tous les documents et avez pu soulever ces questions lors de cette commission d'enquête, ce qui contribue à une transparence utile. Cependant, ces différents projets feront l'objet d'un régime d'autorisation distinct, ce qui permettra un contrôle sur leur valeur socio-économique et environnementale.

Quant à l'avis de l'ART sur les durées de concessions de 20 ans plutôt que de 55 ans, je pense que c'est un sujet intéressant qui renvoie à la future génération des contrats de concessions. Je ne partage pas l'avis de l'ART sur ce point, et ce n'est pas non plus l'avis des services. Cela dépend de ce que l'on entend faire en termes de concessions et des volumes d'investissement. Les longues durées compensent généralement de gros investissements. On est passé d'un régime où l'on construisait 300 kilomètres d'autoroutes nouvelles par an à un régime où l'on ne construit plus que 50 kilomètres tous les trois ans. Certains peuvent s'en accommoder, d'autres peuvent s'en désespérer, mais ces données sont assez objectives. La réduction de la durée des concessions anticipe le fait que la nouvelle génération de concessions nécessitera moins d'investissements, couvrira moins de kilomètres à créer ou à entretenir, et impliquera donc des durées d'amortissement plus courtes. Je pense que l'avis de l'ART repose sur ces considérations. Nous n'avons pas beaucoup de retours à ce sujet. Un objet autoroutier a une durée de vie de cent ans, et nous en sommes aujourd'hui à une cinquantaine d'années. D'ici quarante ans, nous pourrons observer une dégradation significative de ces infrastructures. Nous avons déjà constaté ce phénomène sur le réseau ferroviaire, où la dégradation n'est pas linéaire, mais plutôt exponentielle. Il est possible que cela soit également le cas pour le réseau autoroutier. Il est important de rester agnostique sur ce sujet. Je constate que l'avis de l'ART repose sur le fait que les objets autoroutiers sont moins fréquents, de taille plus réduite, nécessitent moins d'investissements et peuvent alors bénéficier de durées plus courtes. Cette logique et cette philosophie méritent d'être débattues. Personnellement, je suis toujours ouvert au débat. Voilà ce que je pouvais dire sur ce sujet.

Je pense que cela conclut les réponses que je pouvais vous apporter aujourd'hui.

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