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Intervention de Thierry Guimbaud

Réunion du jeudi 30 mai 2024 à 10h00
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Thierry Guimbaud, président de l'Autorité de régulation des transports :

Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, je me réjouis de vous rencontrer aujourd'hui... Lors de notre dernière rencontre, nous avions longuement discuté de la vision du régulateur sur ces grandes variables du projet que sont les coûts d'investissement et les niveaux de trafic, soit des éléments fondamentaux de l'équilibre d'une concession.

Je comprends que vos interrogations actuelles portent davantage sur les modalités précises du financement de l'A69.

Vous nous interrogez sur le recours à des prêts subordonnés d'actionnaires, sur les échéanciers de remboursement de dettes, ainsi que sur les leviers d'endettement de prêts et en somme, sur la stratégie financière du concessionnaire. Nous nous efforcerons de vous répondre de la manière la plus précise possible, mais je souhaiterais préalablement clarifier le rôle de l'Autorité de régulation des transports (ART).

D'une part, l'ART évalue le taux de rentabilité interne (TRI) de la concession du projet. La comparaison des recettes et des dépenses hors financement nous permet de déterminer la rentabilité potentielle pour un actionnaire ou un financeur. D'autre part, l'ART examine si la rentabilité et les coûts de financement, notamment le coût moyen pondéré du capital (CMPC), sont raisonnables et conformes aux attentes logiques sur ce type de projet. Cette partie de l'analyse s'intéresse aux coûts d'investissement, de fonctionnement et aux trafics.

La mission de l'ART consiste donc à émettre un avis, en amont du Conseil d'État, sur une nouvelle concession ou un avenant, afin de nous assurer que le montant des péages demandé aux usagers de l'infrastructure couvre raisonnablement les coûts. Il s'agit pour l'ART que ces coûts, qu'ils soient d'investissement, de fonctionnement ou de financement, soient pris en charge par l'usager de manière raisonnable à travers le péage.

Il n'est pas dans les prérogatives de l'ART d'examiner finement l'organisation des modalités de financement, les techniques d'endettement ou les niveaux d'endettement par rapport aux fonds propres, que ce soit à l'entrée de la concession ou tout au long de sa durée. Nous ne procédons pas à l'analyse exhaustive des coûts de construction, d'abord parce que les coûts d'investissement et de travaux comportent des milliers de lignes et demandent des compétences considérables et variées. Nous en serions bien incapables et ne serions surtout pas fondés à le faire.

En revanche, nous menons des analyses comparatives pour estimer si le coût final, et donc celui du péage, correspond à une bonne pratique et reste soutenable. Notre office consiste très précisément à vérifier que le niveau du péage est acceptable.

S'agissant des investissements, là encore, notre rôle n'est pas d'évaluer l'épaisseur d'une couche de bitume, ce qui relève du travail du concessionnaire et du concédant. Nous considérons le financement global sur la base d'une approche et de méthodes normées, notamment au travers du CMPC, laquelle est utilisée par tous les régulateurs. Le CMPC est une méthode moyenne ; elle n'est pas spécifique à un montage particulier.

Pour bien comprendre notre rôle, il est essentiel de garder cela à l'esprit. Les questions assurément légitimes qui peuvent nous être posées ne trouveront de réponses que si elles entrent dans notre champ de compétences.

Il est légitime que le risque financier, tout comme le risque lié à la concession, le risque pendant la phase de travaux ou le risque de trafic, soient assumés par le concessionnaire. Par conséquent, la gestion des montages financiers nécessaires au fil de la concession relève de sa responsabilité. Notre rôle consiste à vérifier la validité du TRI, non seulement celui annoncé, mais également celui qui ressort de l'évaluation effectuée selon nos propres méthodes.

Au titre de notre mission, nous avons identifié des aspects positifs et négatifs, ce qui nous conduit à considérer un taux de rentabilité interne légèrement différent dans notre analyse. Il s'agit de nous assurer d'un taux de rentabilité interne proche du taux de financement, c'est-à-dire du CMPC. Dans le cas présent, nous avons validé un taux d'environ 4,5 %.

Le CMPC tient compte des taux sans risque pour de l'endettement, des écarts de taux ainsi que de divers dispositifs et notamment ceux relatifs aux financements d'actifs selon les méthodes du modèle d'évaluation des actifs financiers. Toutes ces techniques bien connues sont neutres par rapport au projet spécifique. Nous choisissons toujours le CMPC optimum, c'est-à-dire le plus bas possible, en tenant compte du choix entre la part d'endettement et la part de fonds propres.

Le concessionnaire peut évidemment retenir un autre dispositif en concertation avec le concédant, mais de cette manière, nous nous assurons que, in fine, le péage représentera le juste prix, la juste rémunération de tous les facteurs de coûts, notamment de financement, que représente une concession. C'est ce qui motive notre avis.

Dans le cas présent, dans notre avis envoyé au Conseil d'État, nous avons estimé qu'il y avait une égalité dans les termes et qu'il n'y avait pas d'indication suggérant que l'équilibre de la concession était compromis, eu égard au niveau de péage, qui doit rester raisonnable.

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