Cela amène à la question, assez structurante dans la négociation commerciale, de la marche en avant du prix, à laquelle nous croyons. Lorsque j'achète un yaourt, je ne sais pas forcément à quel prix le lait qui a servi à le faire a été payé. Ce à quoi nous croyons, c'est à la transparence – et il faut encore avancer sur ce sujet – et surtout à un premier niveau de négociation.
Sur cent produits agricoles, cinquante vont à la grande distribution et, parmi eux, on n'a que 20 % d'achat direct de produits bruts ; 80 % passent aux mains d'un industriel qui les transforme et nous les vend. Pour améliorer le revenu agricole, nous pensons que le premier niveau de négociation devrait obéir aux mêmes contraintes que les négociations commerciales : on pourrait fixer une date butoir et décider par exemple qu'au 1er décembre, tous les prix agricoles doivent avoir été négociés par les industriels, avec des indicateurs qui sanctuarisent les coûts de production et qui intègrent par exemple le coût de l'alimentation des animaux. Ces prix, une fois établis, seraient annexés aux conditions générales de vente (CGV) et ne seraient plus négociés au niveau des distributeurs : cela permettrait de sécuriser le revenu agricole.
En 2023, alors que nous étions en négociation avec Lactalis et qu'il fallait signer avant le 31 janvier, une organisation de producteurs nous a écrit trois fois pour nous dire de ne pas signer parce qu'ils ne s'étaient pas encore mis d'accord sur le prix du lait. C'était très embêtant car nous risquions de payer 4 millions d'amende si nous dépassions la date butoir. Si nous avons, en annexe, un document où l'industriel s'engage à revaloriser le prix payé aux producteurs, les choses seront plus simples. Cela n'arrangera évidemment pas une multinationale qui fait de l'export puisque cela va mettre de la confusion dans ses marges et son modèle économique, mais il y aurait une vraie amélioration en matière de marche en avant du prix si l'on arrive, avec Egalim 4, à sanctuariser le prix que l'industriel paie au monde agricole : la négociation pourrait obéir aux mêmes règles que celles qui ont lieu entre un industriel et un distributeur, avec des dates butoir et des sanctions si elles ne sont pas respectées.