On ne peut pas mettre sur le même plan le glyphosate et les néonicotinoïdes.
La loi de 2016 pour la reconquête de la biodiversité prévoyait l'interdiction des néonicotinoïdes dans les semences enrobées. À mon arrivée au ministère, j'avais indiqué, créant d'ailleurs un certain émoi, que s'il était hors de question de revenir sur cette loi, que j'avais votée, on ne pouvait pas décréter une interdiction sans proposer de solution. Julien Denormandie vous l'a certainement confirmé : il s'était efforcé d'élaborer un projet de loi encadrant l'utilisation des néonicotinoïdes pendant trois campagnes de production de betteraves lorsque la CJUE, de façon souveraine, a rendu une décision que nous nous devions d'appliquer. Cela ne signifie pas pour autant que le problème est réglé, puisque l'interdiction des néonicotinoïdes impose de lutter contre le puceron et la jaunisse de la betterave avec d'autres produits. L'Institut technique de la betterave (ITB) a d'ailleurs beaucoup travaillé pour les développer, comme la vice-présidente Hélène Laporte et moi-même l'avons constaté à l'occasion de la mission d'évaluation que nous avons menée sur la loi du 14 décembre 2020.
Vous établissez un parallèle avec le glyphosate, qui était devenu un totem. Depuis Paris, on a parfois une vision folklorique de la réalité des territoires : le glyphosate y était décrit tour à tour comme un fongicide, un pesticide, un herbicide. C'est un herbicide. Personne n'a particulièrement envie de l'utiliser mais, pour certaines activités agricoles – les vignes en pente, les légumes d'industrie, l'agriculture de conservation –, nous n'avons toujours pas trouvé de produit de substitution. L'objectif du Président de la République était d'en interdire l'utilisation partout où cela était possible.
La question que tout gouvernement et toute majorité doivent s'attacher à traiter est celle de la dangerosité du produit telle qu'elle est définie par la science. Il s'agit de se conformer aux avis de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), qui sont les seuls qui comptent et sur lesquels la décision politique doit s'appuyer. L'utilisation du glyphosate a drastiquement diminué, que ce soit dans les communes, où il ne peut plus être pulvérisé pour entretenir les voies de circulation douce ou les cimetières, ou dans le cadre de l'agriculture de conservation. Cette évolution peut parfois créer des difficultés mais elle est entrée dans les mœurs et elle se poursuivra.
Lors de l'examen de la loi Egalim, la question du glyphosate avait été introduite par le biais d'un amendement prévoyant une interdiction sèche. Nous avons préféré créer une task force réunissant l'ensemble des filières utilisatrices pour déterminer lesquelles disposaient de solutions alternatives et lesquelles n'en avaient aucune. Ce travail doit continuer.
Faisons aussi confiance à la recherche et à l'innovation. On en revient toujours au même problème : le monde agricole doit générer suffisamment de revenus pour investir à la fois dans l'outil de production et dans la science afin de pouvoir se passer des produits phytosanitaires ou de les remplacer par des produits de biocontrôle. Tel est bien toujours l'objectif du Gouvernement, du Président de la République et de la majorité.