La loi Egalim a subi un certain nombre de critiques – mais c'est le lot de tous les textes qui vont soit trop loin, soit pas assez loin.
La loi Egalim n'est pas née en juin 2017. Elle résulte d'abord du constat que les producteurs nous ont rapporté lorsque nous sommes allés à leur rencontre durant la campagne électorale avec Emmanuel Macron, mais aussi d'un ensemble de travaux réalisés par certains parlementaires au cours de la législature précédente, à l'occasion de la mise en œuvre de la loi Sapin 2 et de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt. Cette dernière mettait en avant l'agroécologie, avec déjà pour objectif de concourir à la souveraineté alimentaire de notre pays.
J'ai un souvenir très précis du jour où nous avons décidé d'organiser les États généraux de l'alimentation. C'était durant la campagne, en mars 2017, lors d'une visite du candidat à La Chapelle-Rainsouin, petit village de Mayenne. Des producteurs de lait nous y avaient fait part de leur complet désarroi de ne pas maîtriser leurs coûts de production et de subir le prix payé par leur collecteur. Nous nous sommes dit que nous pouvions inverser les choses. Pourquoi la profession d'éleveur laitier – et plus largement l'agriculture – reste la seule où c'est le fournisseur qui reçoit une facture de son client et qui ne sait pas combien son produit lui sera payé ?
Grâce à la loi que nous avons fait adopter, les agriculteurs et les organisations de producteurs – qui sont l'échelle pertinente – ont la possibilité de facturer eux-mêmes le lait au collecteur.
La loi Egalim avait aussi pour objectif une meilleure répartition de la valeur en rendant impossible de vendre à perte. Cela passait par l'établissement d'indicateurs de coûts de production, un travail qui a été mené par l'ensemble des acteurs de l'interprofession.
Le 17 novembre 2017, ceux qui étaient autour de la table représentaient près de 16 % du PIB français et ils ont tous signé une charte d'engagement sur les états généraux de l'alimentation, en jurant la main sur le cœur de répartir la valeur au mieux des intérêts de chacun. Tous les maillons doivent bien évidemment pouvoir vivre et gagner de l'argent, mais en faisant en sorte que le maillon le plus faible, c'est-à-dire le producteur agricole, jusqu'alors toujours pressuré, ne soit plus laissé pour compte. La répartition devait désormais se faire équitablement.
Voilà quelle fut la genèse de cette loi, dont l'idée est née durant la campagne, au cours de laquelle le candidat Emmanuel Macron avait fait un certain nombre de propositions.
Lorsque j'ai été nommé le 21 juin, ma feuille de route était déjà prête. J'avais pour tâche d'organiser dès le 11 juillet les États généraux de l'alimentation en réunissant tous les acteurs pendant plusieurs journées. Ouvertes par le Premier ministre Édouard Philippe et moi-même, celles-ci ont été marquantes et beaucoup s'en souviennent encore comme d'une période où beaucoup de choses étaient possibles et où l'on pouvait remettre les compteurs à zéro pour repartir sur de bonnes bases. Ce fut aussi l'occasion de discuter de nouveau pour beaucoup d'acteurs qui ne se parlaient plus.
J'anticipe un peu, mais je crois qu'une nouvelle session de ces états généraux serait plutôt bienvenue, car il faut de temps en temps se remettre autour de la table pour tracer des perspectives et voir comment l'on peut progresser.