. – Il convient de distinguer les scientifiques et les médecins. En France, la formation de ces deux populations n'est pas mixte. J'étais président de la commission de l'Assemblée nationale pour le suivi de la pandémie. Au début, nous avons entendu les scientifiques. Cela n'a pas duré longtemps, car leur position scientifique est une position de doute. Pour les journalistes, il n'est pas intéressant d'entendre « Je ne sais pas ». Or, nous ne pouvions rien dire d'autre pendant les premiers mois. Les scientifiques ont donc très rapidement été remplacés par des médecins. J'ai découvert à la télévision des infectiologues inconnus du sérail de la bactériologie ou de la virologie. Nous devons nous interroger sur les personnes à qui nous donnons la parole.
Je me souviens de la commission d'enquête à l'Assemblée nationale. Nous étions deux à prendre la parole face à Didier Raoult, dont la dérive morale et intellectuelle était connue depuis longtemps, dans une indifférence générale. Les plus hautes autorités de l'État se sont rendues à son chevet. Nous l'avons laissé vendre son hydroxychloroquine, alors que nous savions depuis longtemps qu'il se passait des choses peu claires à l'IHU de Marseille. Cela a fait beaucoup de mal. Nous sommes beaucoup de scientifiques à avoir souffert de cette situation. Notre parole de sachant portait de moins en moins.
Je reste inquiet pour l'avenir lorsque je constate l'effondrement de l'intérêt pour la science, les technologies et l'industrie. Les études d'opinion sont dramatiques. À l'entrée en 6e, la France est l'avant-dernier pays de l'OCDE en matière de culture scientifique. Pourquoi ne comprenons-nous pas que la science et la santé constituent une porte d'entrée massive pour les complotistes et les extrémistes ? Nous devons avoir une réaction à la hauteur.