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Intervention de Sonia de La Provôté

Réunion du jeudi 30 mai 2024 à 9h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Sonia de La Provôté, sénatrice, rapporteure :

. – Le troisième volet de notre rapport concerne la surveillance et les outils de surveillance épidémiologique.

La crise sanitaire a entraîné une mobilisation scientifique sans précédent et internationale. Si le développement de vaccins efficaces en moins d'une année a constitué la plus grande prouesse, de nombreuses autres innovations sont venues en soutien des mesures de santé publique. Nous avons fait le choix de revenir ici sur les outils de surveillance épidémiologique et d'anticipation sanitaire développés pendant la crise, dans la continuité des débats soulevés lors de nos rapports précédents.

La surveillance épidémiologique coordonnée par Santé publique France vise à suivre l'émergence et l'évolution des épidémies et problèmes de santé et à acquérir des connaissances sur leurs caractéristiques. Elle permet de dresser une image globale de la situation sanitaire et d'anticiper les risques à venir. Cette surveillance s'est avérée déterminante pour suivre et contenir la propagation du virus grâce au déploiement de mesures d'alerte, de prévention et de contrôle.

Les nouveaux fichiers mis en place ont permis de suivre la propagation du virus, son impact hospitalier et la couverture vaccinale au travers des fichiers SI-DEP (suivi du dépistage), SI-VIC (suivi des victimes) et SI-VAC (vaccinations covid-19). Le fichier Contact-covid a, pour sa part, permis de suivre les chaînes de contamination.

Ces dispositifs ont été source de débats en termes de suivi, de surveillance, de protection des données et de protection individuelle. La phase aiguë de la pandémie étant révolue, certains de ces fichiers ont été interrompus, tandis que d'autres ont évolué pour s'adapter à la situation sanitaire. Une forme simplifiée du fichier de suivi du dépistage néoSI-DEP a ainsi vu le jour en 2023, dans l'attente d'un système plus exhaustif (Laboé-SI) qui permettra de suivre un plus grand nombre de maladies et pourra s'adapter aux crises sanitaires futures. De même, le projet Orchidée (Organisation d'un réseau de centres hospitaliers impliqué dans la surveillance épidémiologique et la réponse aux émergences) doit mettre au point un outil tirant les leçons des limites et imperfections du fichier SI-VIC pour la remontée des données hospitalières en ne les limitant pas à la covid-19 et en permettant de suivre l'émergence de risques sanitaires nouveaux.

Une autre innovation importante a été développée : l'utilisation de méthodes de suivi du virus à partir des eaux usées. Cette technique, développée antérieurement à la crise, a été déployée pour la première fois à large échelle. L'outil permet de détecter les tendances épidémiques de manière précoce et de suivre la population, pour un coût réduit, indépendamment de son état de santé et de la stratégie de dépistage. Dès le début de la crise sanitaire, le consortium Obépine a démontré les opportunités de l'outil pour suivre l'épidémie de manière quantitative et dans une temporalité pertinente. Soutenu financièrement par le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, ce consortium a pu exploiter de manière expérimentale un réseau de surveillance reposant sur plus de 200 stations pendant plus d'un an. Aujourd'hui, un dispositif pérenne (SUM'Eau) est chargé de la surveillance microbiologique des eaux usées. Opérationnel depuis octobre 2023, ce système doit encore connaître des développements – il ne s'appuie que sur douze stations de traitement des eaux usées et ne permet pas encore de suivre les variants en circulation par séquençage des échantillons prélevés.

Au regard des connaissances acquises et des perspectives en matière de surveillance épidémiologique, il apparaît essentiel de continuer à soutenir et perfectionner les dispositifs de suivi des eaux usées. Cette méthode apparaît très pertinente pour surveiller et anticiper la propagation du SARS-CoV-2, mais aussi d'autres germes. Son extension à d'autres maladies ou problèmes de santé pourrait apporter des bénéfices importants.

Dans cette optique, la construction d'une plateforme de recherche et d'innovation Obépine+, destinée à soutenir les réseaux en développement, doit être bien soutenue.

La surveillance génomique, quant à elle, a pour objet de suivre l'évolution du virus pour anticiper les conséquences associées à ses mutations. Un développement important des capacités de séquençage a été entrepris pendant la crise sanitaire, rattrapant le retard que nous avions accumulé. Créé en janvier 2021, le consortium Emergen a permis d'identifier l'émergence de nouveaux variants et la répartition des variants circulant sur le territoire. Aujourd'hui, ce consortium a adapté ses activités au niveau de circulation actuel du virus et évoluera prochainement pour inclure de nouveaux agents pathogènes.

En mettant en lumière les lacunes de notre capacité de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, des leçons ont pu être tirées de la crise sur le plan organisationnel. De nouvelles structures ont ainsi été créées. En France, un centre de crise sanitaire a été institué au sein de la direction générale de la santé tandis que l'Union européenne a créé une Autorité européenne de préparation et de réaction en cas d'urgence sanitaire.

Ces démarches de retour d'expérience doivent être encouragées. Face au risque d'émergence ou de réémergence de virus, il apparaît crucial de tirer toutes les leçons des échecs et des succès de notre gestion de la pandémie. La période post-pandémique doit être utilisée pour réévaluer notre organisation et accroître nos efforts en matière d'anticipation et de préparation.

La recherche, cruciale dans la réponse à la crise sanitaire, doit faire l'objet d'un soutien public important. Les principaux axes de travail concernent les menaces susceptibles d'entraîner des crises sanitaires majeures, les facteurs d'émergence de ces crises, les solutions de prévention à encourager et les mesures médicales à mettre en place.

Ainsi, nous recommandons de :

 maintenir une surveillance approfondie du SARS-CoV-2 pour anticiper les risques pouvant résulter de sa circulation persistante ;

 définir et déployer une stratégie de recherche sur les menaces sanitaires, fondée sur le continuum recherche fondamentale/recherche appliquée ;

 renforcer le système de surveillance pour détecter précocement et suivre l'évolution de toute menace sanitaire ;

 veiller à ce que le système de surveillance soit étroitement articulé avec l'effort de recherche sur les outils de surveillance développés ;

 poursuivre le retour d'expérience sur la crise de la covid-19 et investir pour améliorer les capacités d'anticipation, de préparation et de réponse aux futures crises sanitaires.

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