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Intervention de Christophe Ramond

Réunion du mercredi 22 mai 2024 à 17h15
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Christophe Ramond, président du conseil départemental du Tarn :

Avant de formuler mes réponses aux vingt questions que vous m'avez adressées, je tiens à préciser que j'ai pris mes fonctions le 15 septembre 2017. Le projet de l'autoroute A69, bien que pertinent pour notre département, a mis de nombreuses années à voir le jour. En octobre 2023, je me suis en effet exprimé avec force en sa faveur.

Le cahier des charges de la convention de concession conclue avec Atosca, dans sa version d'avril 2022, stipule qu'un montant de concours public maximum de 23,13 millions d'euros lui est versé au titre de la concession. La première question formulée par madame la rapporteure porte sur le processus de négociation. Pour rappel, la genèse de ce projet d'autoroute remonte à un courrier daté du 11 décembre 2012, basé sur un projet d'aménagement de la liaison entre Castres et Toulouse, évalué à 403 millions d'euros. Ce courrier mentionnait également le principe d'une possible concession, ainsi qu'une subvention d'équilibre estimée à 146 millions d'euros hors taxes, prise en charge à 50 % par l'État et à 50 % par les collectivités locales. Le conseil départemental du Tarn a délibéré le 15 février 2013, validant l'intention de participation sur la base d'un aménagement à deux fois deux voies, selon les modalités financières et les capacités contributives de notre collectivité à ce moment-là.

Le 29 novembre 2013, le préfet de la région Midi-Pyrénées a adressé un courrier aux élus et aux acteurs socio-économiques du Tarn, présentant les deux options permettant la poursuite du projet : la concession ou la maîtrise d'ouvrage public. Mon prédécesseur, le 2 décembre 2013, avait sollicité le président de la République de l'époque, M. François Hollande, afin de rappeler la nécessité de désenclaver le plus rapidement possible le Sud de notre département. Une délibération du conseil départemental, en date du 28 février 2014, s'est prononcée, à une très large majorité, en faveur d'un aménagement concédé.

La question suivante porte sur l'initiative de la collectivité publique que je dirige quant au versement d'un concours public. Je n'étais pas président du conseil départemental à l'époque, mais j'ai cherché à retrouver l'historique de ce projet : le département du Tarn n'a pris aucune initiative sur ce sujet. Le système de la subvention d'équilibre a toujours été admis et accepté par la collectivité territoriale que je représente. Je n'ai eu aucun échange dans le cadre de ces négociations, ni avec le concessionnaire Atosca, ni avec aucun investisseur potentiel intéressé par ce projet.

Vous m'interrogez sur la différence entre le montant de 24,6 millions d'euros mentionné dans l'annexe 18, et le montant de 23,13 millions d'euros indiqué dans l'article 24 du contrat de concession. Il serait pertinent d'interroger le rédacteur du document pour clarifier ce point. Toutefois, je suis convaincu que la valeur définitive des concours publics est bien de 23,13 millions d'euros, comme stipulé à l'article 24.2 du contrat de concession.

Ce montant a été fixé par le contrat de concession et les conventions de financement avec l'État. Il pourrait être éventuellement modifié par voie d'avenant à ces contrats, conformément à l'article 3 de la convention. Cependant, il me semble que ce serait une procédure relativement lourde, nécessitant une validation du Conseil d'État. Pour cette raison, une modification semble aujourd'hui peu probable. La clé de répartition entre les cinq collectivités territoriales contributrices a été établie sur proposition de l'État, et résulte des parts respectives votées dans les délibérations de chaque collectivité. Le montant est calculé au prorata des contributions votées initialement. Notre département a voté le plan de financement le 10 décembre 2021, et c'est ce plan de financement que nous déroulons actuellement. Chacun des montants dus au concessionnaire au titre des concours publics est actualisé par application d'un coefficient prenant en compte des indices de prix à la consommation. Je n'ai pas connaissance de la valeur actualisée des sommes à verser, qu'il revient à l'État de notifier.

Une partie de la somme à verser au titre du concours public doit l'être à l'entrée en vigueur du contrat de concession, une autre à l'obtention de l'autorisation environnementale unique. L'échéancier de versement des fonds publics est déterminé par le contrat de concession, sur la base d'événements clés, ce qui est l'usage en la matière. En vertu de ce contrat de concession et de l'avenant du projet, les versements ont été effectués par le conseil départemental à l'État, sur appel de sa part au titre de cette convention de financement. À ce jour, les versements s'élèvent pour le conseil départemental du Tarn à 326 742 euros en 2022 et 1 408 373 euros en 2023, pour un total de 1 735 116 euros, en application de la délibération du 10 décembre 2021. Nous continuerons à respecter ce plan de financement.

Je ne saurais vous répondre précisément quant au caractère ordinaire ou non de la part des concours publics au regard du coût total estimé des travaux, qui s'établit en l'occurrence à 6 %. Je ne peux que constater que le reste à charge publique est faible.

Le projet d'élargissement en deux fois deux voies de la RN126 entre Castres et Toulouse a longtemps été envisagé sur crédits d'État, avant qu'il soit décidé de recourir à une autorité concédée. J'ai commencé ma mandature en 2017, alors que ce projet était déjà en cours, et que le contrat de concession était déjà établi. Il ne m'appartient pas d'évoquer une période où je n'étais pas encore conseiller départemental, et encore moins président du conseil départemental. Aujourd'hui, vous l'avez bien compris, je suis très attaché à la poursuite de ce projet et à sa réalisation dans les délais prévus.

La convention conclue entre l'État, les collectivités territoriales et Atosca relative aux concours publics pour la réalisation de l'autoroute A69 prévoit que, préalablement à chaque échéance, les collectivités territoriales contributrices pourront convenir entre elles, le cas échéant et après accord de l'État, d'une répartition différente du montant des concours publics. Je n'avais pas connaissance de l'activation de cette modalité. Selon moi, cette question n'est pas d'actualité aujourd'hui.

Cette même convention stipule que si d'autres collectivités ou établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) souhaitent contribuer au financement de la part des concours publics, un accord séparé déterminera les modalités de leur participation. À ma connaissance, aucune autre collectivité territoriale ne s'est manifestée. Le tour de table a été effectué avec les territoires concernés, les deux départements, la région Occitanie et les deux intercommunalités tarnaises.

Les collectivités territoriales ayant contribué à la subvention d'équilibre pourront percevoir des sommes au titre du partage des gains financiers, du partage des fruits de la concession et du reliquat non utilisé des sommes versées pour la politique du « 1 % paysage, développement et cadres de vie », sans que ces sommes ne puissent excéder le montant versé. Percevoir des sommes à ce titre me semble toutefois peu probable à ce jour. Mais si tel était le cas, je proposerais que les gains potentiels soient destinés de préférence à diminuer le coût du péage pour les usagers.

Votre questionnaire aborde ensuite la diminution du montant de la subvention d'équilibre. Le projet de concession avait été évalué à 270 millions d'euros en 2007, dont 100 millions d'euros de financements assurés par l'État et les collectivités locales. En 2012, la direction régionale de l'environnement de l'aménagement et du logement (Dreal) aurait imaginé un scénario portant la subvention d'équilibre à plus de 200 millions d'euros, le coût des travaux étant alors estimé à plus de 400 millions d'euros. Le 6 septembre 2021, lors d'une réunion à la préfecture de région, le représentant de l'État a évoqué une très forte diminution de la subvention d'équilibre. L'information a été communiquée à nos assemblées lors de la délibération du plan de financement, qui s'est tenu le 10 décembre 2021. Vous me demandez pour quelle raison le montant de la subvention d'équilibre versé par l'État et les collectivités territoriales a été drastiquement revu à la baisse, alors que le montant global des travaux n'a pas diminué, et s'élève toujours à environ 450 millions d'euros. Cette question est certainement pertinente, mais je ne suis pas le mieux placé pour y répondre. Il conviendrait de l'adresser à l'État et à Atosca.

Par ailleurs, vous souhaitez savoir si nous avons eu connaissance des grandes lignes des offres concurrentes, notamment en ce qui concerne les tarifs de péage et le niveau des concours publics. Lors de la réunion du 6 septembre 2021, l'État a présenté de manière succincte et anonyme les grandes caractéristiques des différentes offres. La subvention d'équilibre faisant partie des critères d'attribution de la concession, le concessionnaire était libre de fixer les conditions économiques de son offre. Celle-ci est devenue contractuelle, et il devra à l'avenir assumer les risques inhérents à ce type de contrat.

Il me semble évident qu'il existe un lien entre les subventions publiques et les tarifs des péages. Je me suis exprimé à plusieurs reprises, notamment lors de cette réunion du 6 septembre 2021 à la préfecture de région, sur la proposition de maintenir le niveau initial de participation, en échange d'une baisse du tarif des péages. J'étais prêt à maintenir une contribution de 31 millions d'euros de la part du conseil départemental du Tarn, à condition que l'État et les autres collectivités territoriales interviennent de manière similaire. Les services de l'État m'avaient alors répondu que, dans le cadre de cette procédure de concession, un bouleversement des conditions économiques du contrat nous exposerait à un risque de contentieux. Pour ma part, j'ai toujours affirmé que nous avions mobilisé cette enveloppe de 31 millions d'euros. Les 28 millions d'euros que nous aurions pu allouer dans ce cadre ont été investis dans les routes départementales, afin de favoriser les interconnexions et d'améliorer l'ouverture vers l'Hérault. Ainsi, dans le cadre du budget 2024 que nous allons voter, nous réaliserons un créneau de dépassement supplémentaire afin de sécuriser les routes départementales entre Castres, Mazamet et l'Hérault.

M. Pascal Bugis, maire de Castres, a suggéré lors d'une audition devant votre commission l'organisation d'une table ronde avec l'État et les collectivités territoriales cofinançant le projet de subvention d'équilibre, afin d'envisager une baisse du coût du péage. Je suis évidemment disposé à participer à une telle réunion avec l'ensemble des financeurs. J'ai même sollicité directement le ministre des transports et cosigné un courrier avec la présidente de région, afin de favoriser ce type de rencontre. La proposition de M. Bugis correspond par conséquent à nos objectifs.

Vous me demandez un point de vue sur l'affectation des sommes issues du partage des gains financiers, du partage des fruits de la concession et du reliquat non utilisé des sommes prévues pour la politique « 1 % paysage, développement et cadres de vie ». Vous me demandez s'il convient d'affecter prioritairement ces sommes au remboursement des concours publics, ou bien les consacrer à une baisse des tarifs de péage. Je vous réponds qu'il est évident que nous nous attachons de manière prioritaire à veiller à ce que le coût de ce péage soit le moins élevé possible.

Les questions suivantes concernent la prise de participation du groupe Pierre Fabre, via Tarn Sud Développement, ainsi que celles de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) du Tarn et de onze autres entreprises tarnaises au capital de la société Atosca. J'ai découvert ces informations par voie de presse, et ne dispose pas d'éléments particuliers sur ce dossier. Je vous donnerai la même réponse concernant la prise de participation du groupe Pierre Fabre avec Atosca et Gaïa Energy Systems sur le projet d'installation d'une ferme solaire de 40 mégawatts lors de la mise en service de l'autoroute. Je n'ai, là non plus, pas d'informations spécifiques à délivrer, ayant pris connaissance de ces informations par la presse.

Votre questionnaire s'achève par une question concernant l'aéroport de Castres-Mazamet. M. Bugis a indiqué que l'ouverture de l'autoroute A69 pourrait entraîner la fin de la participation de la région Occitanie au syndicat mixte de l'aéroport régional de Castres-Mazamet. Je pense, pour ma part, qu'une réflexion d'ensemble avec l'État et les cofinanceurs est nécessaire pour envisager l'avenir de cet aéroport. Notre convention d'exploitation de la ligne Castres-Mazamet-Paris Orly est valable jusqu'au 31 mai 2026. Cela nous laisse deux ans pour recueillir les intentions de la région et de l'État, lequel a diminué ses participations financières.

En conclusion, j'exprime ma confiance envers les décideurs publics locaux et l'État pour prendre la meilleure décision, sachant que notre objectif initial est de désenclaver notre territoire. L'ouverture de l'autoroute A69 entraînera le déclassement de la RN126, qui sera désormais à la charge des conseils départementaux de la Haute-Garonne et du Tarn. Le chiffrage du coût de cet entretien est en cours, et je vous fournirai des éléments sur ce point. Je peux néanmoins vous indiquer dès à présent que le déclassement de la RN126 et de la RN112, qui contourne Castres, correspond à 60 kilomètres de voirie, 54 ouvrages d'art, sept bassins d'assainissement et six aires de repos. Ce déclassement représente pour notre collectivité un coût de 14,5 millions d'euros. En termes de fonctionnement, l'enveloppe requise serait de 100 000 euros par an, en incluant les coûts de personnel. Pour l'investissement nécessaire au maintien en état de ces 60 kilomètres de voirie, nous prévoyons une dépense de 1,35 million d'euros par an. Je prévois également de mobiliser une enveloppe de 2,5 millions d'euros pour l'achat et la modernisation de matériel, amortissable sur 15 ans. De plus, nous profiterons de ces aménagements pour réadapter nos centres d'exploitation, avec une enveloppe de 400 000 euros en investissement, afin de garantir la proximité de nos infrastructures routières. En effet, en cas de tempête ou d'intempéries, les services de secours interviennent de manière prioritaire, et il est essentiel de disposer de centres de secours proches.

Je crois avoir répondu à l'ensemble du questionnaire, et me tiens à votre disposition pour toute question supplémentaire.

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