Des personnes de tout type frappent à la porte de notre association. Elles sont nombreuses à ne pas correspondre à l'objet de notre association et à nous écrire à l'adresse de contact qui se trouve sur notre site internet. Nous ne les laissons pas tomber : la commission victimes leur répond à chaque fois pour les envoyer au bon endroit, qui peut, par exemple, être la plateforme d'Audiens, un de nos partenaires, ou d'autres associations dont l'objet est plus en phase avec le milieu ou avec ce que dénonce la victime, comme la question des mineurs ou celle de la politique, que nous ne traitons pas car nous n'avons pas d'expertise.
Certaines victimes que nous accompagnons se sont déjà constituées partie civile – il arrive même que leur affaire ait déjà fait l'objet d'un jugement – et se trouvent donc à un stade avancé de la procédure. Ces victimes tiennent à peu près debout, parce qu'elles ont déjà réalisé ce parcours judiciaire. Tu en sais d'ailleurs quelque chose, Florent. Elles connaissent donc le chemin et nombreuses sont celles qui nous rejoignent dans notre combat. Elles aident alors d'autres victimes, notamment au sein de nos commissions.
Certaines victimes sont plutôt en début de chemin. Elles se trouvent souvent dans un état de fragilité auquel il faut faire attention. Nous prenons alors le temps de les accueillir, de les entourer et de les conseiller, mais nous n'imposons rien. Nous allons les amener tranquillement à la plainte et essayer de restaurer leur confiance dans la justice, ce qui n'est pas toujours évident, vu le nombre de classements sans suite. Nous les accompagnons une fois qu'elles sont prêtes, après avoir discuté et repassé la chronologie des faits. Nous pouvons les aider à rédiger leur plainte avant de l'envoyer directement au procureur ou de la déposer au commissariat avec la victime. Nous disposons d'avocates et de conseils, qui interviennent à un moment ou un autre. Nous couvrons tout le spectre.
Nous nous concentrons sur les milieux de la culture et nous cherchons le ruissellement, qui est plus facile lorsque le prédateur est connu, car cela parle aux journalistes et aux instances auprès desquelles la plainte est déposée. Si le prédateur n'est pas un acteur, un animateur de télévision ou un musicien connu, c'est plus compliqué. On nous reproche d'utiliser les médias comme tribunal, mais ce n'est pas vrai : 90 % des affaires que nous traitons ne sont pas médiatisées et elles nous demandent autant de travail, du côté des victimes comme du côté de l'association, que les affaires médiatisées, comme celle de Jean-Jacques Bourdin, la première que nous ayons sorti, de Stéphane Plaza, de Gérard Depardieu, de Vincent Cerutti ou de Manu Levy, que nous avons sortie avec Libération. Je rappelle que nous sommes tous bénévoles.