Nous commençons la troisième semaine de nos travaux par l'audition des auteurs de Toxique. Enquête sur les essais nucléaires français en Polynésie, fruit d'une collaboration entre Disclose, Interprt et le programme Science and Global Security de l'université américaine de Princeton. Nous recevons donc M. Sébastien Philippe, enseignant-chercheur à l'université de Princeton et membre du programme de recherche que je viens de citer, et M. Tomas Statius, journaliste d'investigation.
La publication de vos travaux en mars 2021 a eu l'effet d'une déflagration, en Polynésie comme à Paris. Elle a notamment conduit le Président de la République à inviter l'ensemble des parties prenantes à une table ronde à l'Élysée, puis à se rendre au Polynésie au mois de juillet de cette même année. Le Président a alors reconnu la dette de la France à l'égard de la Polynésie, et appelé à briser le « silence, pour faire entendre justement toute la vérité, pour qu'elle soit partagée, pour que tout le monde puisse savoir exactement ce qui a été fait, ce qui était su alors, et ce qui est su aujourd'hui, tout ».
Votre audition a d'abord pour objectif de revenir sur vos travaux, leur genèse, la méthode que vous avez suivie et les difficultés que vous avez rencontrées. J'aimerais notamment que vous nous donniez votre point de vue sur l'effectivité de l'accès aux archives, en particulier celles détenues par le CEA (Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives). Surtout, vous rappellerez à la commission d'enquête vos principales conclusions.
À l'époque, le directeur des applications militaires du CEA, M. Salvetti, a dénoncé la « légèreté » dont vous auriez fait preuve, et l'ouvrage publié par le CEA l'année suivante a formulé de nombreuses critiques à l'égard de vos travaux. Vous avez ainsi été accusés d'avoir « extrapolé » les données, s'agissant en particulier de l'essai Centaure. J'attends de vous que vous répondiez à ces critiques et que vous nous disiez ce qui vous a amenés à affirmer, dans un article de Disclose, que la publication du CEA était une « somme d'approximations et de contre-vérités censées discréditer les révélations de Toxique ».
D'autres questions suivront, en particulier de la part de notre rapporteure, qui vous a transmis un questionnaire. Tous les sujets qu'il aborde ne pourront pas être évoqués de manière exhaustive lors de cette audition et nous souhaitons donc que vous nous fassiez parvenir des réponses écrites. Vous pourrez aussi nous adresser tous les éléments qui vous paraîtront utiles.
Avant de vous donner la parole, je vous remercie de nous déclarer tout autre intérêt public ou privé de nature à influencer vos déclarations et je rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous prie de lever la main droite et de dire : « Je le jure ».