Nous sommes pour le moins circonspects.
Les propos de certains collègues révèlent les intentions cachées, quoique si peu, derrière la demande de commission d'enquête. On nous sert toujours la même rengaine : la République serait constamment bafouée ; ses valeurs ne seraient pas respectées ; le pluralisme serait entravé, en particulier dans l'enseignement supérieur.
Après une première tentative déshonorante d'instrumentaliser l'enseignement supérieur avec une enquête sur le prétendu islamo-gauchisme à l'université, les groupes de la majorité s'honoreraient à ne pas persister dans la chasse aux sorcières. Si ce n'était aussi pesant, répétitif et caricatural, nous serions tentés de laisser dire et d'en rire, de ne pas prendre part à cette enquête dont le cadre paraît dépourvu de la rigueur qui devrait le caractériser. Mais nous y serons représentés afin de nous y exprimer et d'entendre ce qu'il s'y dira, et qui parfois nous écorchera les oreilles.
Nous y participerons afin de défendre la liberté académique qui est essentielle à nos yeux. Hendrik Davi l'a dit, l'université doit conserver son autonomie vis-à-vis des pouvoirs politiques et religieux. Cette autonomie dérange nombre de gens et à plusieurs niveaux : lorsque l'on veut minimiser les enjeux climatiques et écologiques, la science est gênante ; lorsque l'on veut museler les libertés individuelles et combattre l'égalité, la liberté d'expression est gênante – je pourrais continuer ainsi longtemps.
Il est préoccupant de nier qu'outre des lieux consacrés à la transmission des connaissances, nos facultés ont toujours été le terrain de joutes politiques et d'expression de la pensée critique.
Je souhaite donc bon courage au futur président de la commission d'enquête pour assurer un débat « de qualité » sans se faire « déborder par d'éventuelles radicalités ». Pour ne pas créer de précédent, nous nous abstiendrons, mais nous resterons extrêmement vigilants.