Je crois que cette baisse est artificielle et qu'elle entraîne des conséquences extrêmement graves sur les équilibres des économies mondiales. Distordre l'information sur la temporalité – puisque le taux d'intérêt représente une variable sur le partage entre ce que nous consommons aujourd'hui et ce que nous consommerons demain – et la rendre indisponible conduit à s'empêcher d'ajuster l'offre à la demande dans le temps.
La tendance longue a fait l'objet d'un grand nombre de travaux. Elle me semble être la conséquence de ce jeu entre la politique monétaire et la politique budgétaire, la deuxième semblant dicter en fait la première. Autrement dit, si l'indépendance du banquier central est établie de droit, elle n'existe pas dans les faits. En effet, le banquier central ne peut pas prendre le risque d'une crise de défaut de paiement d'un État : il est obligé de tenir compte de l'augmentation des risques de défaut des gouvernements. Par conséquent, quand tous les gouvernements s'engagent dans des politiques d'expansion de la dette et des déficits, les autorités monétaires suivent.
Enfin, certains de mes collègues considèrent – mais j'en suis moins convaincu – que nous sommes plus court-termistes et que nous nous projetons moins dans le futur ; ce qui expliquerait selon eux notre tendance à la baisse des taux.