Je propose d'aborder maintenant la question de la modification de l'actionnariat. Cela requiert de faire l'exégèse de ce que nous demandons à l'annexe 16, car les dispositions qu'elle contient lient l'ensemble des actionnaires.
En matière de délégation de service public, nous sommes dans l' intuitu personæ. Lors de la phase de consultation, des candidats déposent des offres. Lors de la phase de candidature, nous évaluons si les groupements retenus présentent des capacités financières, techniques et industrielles suffisantes pour la réalisation de l'opération. Enfin, nous signons un contrat de concession avec une société ad hoc, créée par les membres du groupement sélectionné, selon une répartition communiquée lors de l'appel d'offres.
Pendant les premières années de concession, nous devons avoir l'assurance que les membres du groupement demeureront les actionnaires de la société concessionnaire, afin que les entités dont nous avons évalué les capacités réalisent bien le projet. Cette première période court jusqu'à deux ans après la mise en service de l'autoroute et la capacité des actionnaires à vendre leur participation est alors très restreinte.
Au-delà de cette échéance, c'est-à-dire quand les risques les plus importants – liés à la construction – sont derrière nous, les règles évoluent. Le risque lié au trafic demeure pendant cinquante ans, mais une tendance s'est alors dégagée – même si des événements peuvent toujours survenir, à l'instar de la crise sanitaire de 2020, qui a entraîné une baisse de 20 % du chiffre d'affaires des concessionnaires. Le concédant ne s'intéresse plus qu'aux changements de contrôle de la société concessionnaire car, le cas échéant, l'État change d'interlocuteur principal, les entités décidant des grandes orientations n'étant plus les mêmes. Une telle opération est donc soumise à son avis.
Dans le cas qui nous occupe, les membres du groupement, que vous connaissez, sont NGE, l'exploitant Ascendi, et les investisseurs financiers. NGE a la responsabilité de la conception et de la construction de l'autoroute. Ascendi, lui, a la responsabilité de la performance d'exploitation, c'est-à-dire de l'efficacité du système de perception du péage en flux libre ou de la réalisation des opérations, telles que les interventions sur accident – tout en étant actionnaire de la société concessionnaire. Quant aux investisseurs financiers, leur seule responsabilité est d'apporter des fonds, étant entendu que ni NGE, qui est une entreprise de bâtiment et de travaux publics, ni Ascendi, qui est un exploitant autoroutier, n'ont la capacité de fournir la totalité des financements requis, lesquels ont atteint la somme considérable de 125 millions d'euros. Ainsi, plusieurs entités s'engagent à être les actionnaires de la société concessionnaire pendant des années.
Lors de la phase de consultation, en 2021, le groupement nous a indiqué envisager – certaines de ses anticipations étant manifestement moins difficiles que d'autres à concrétiser – de céder une part minoritaire des capitaux de la société concessionnaire à un ensemble d'entreprises locales. Dans la mesure où l'annexe 16 prévoit un plafond de 10 % du capital pour ce type d'opération, nous avons estimé que cela ne posait pas de problème, d'autant que l'arrivée d'acteurs locaux nous semblait plutôt opportune. En définitive, ce seuil n'a pas été atteint, puisqu'environ 5,3 % du capital a changé de mains – il s'agit tout de même d'une somme importante.
Quel est, au fond, le rôle d'un actionnaire ? Il est non seulement chargé de diriger la société concessionnaire, mais aussi d'assumer ses responsabilités si les choses tournent mal, en réinjectant des fonds si nécessaire. Nous l'avons d'ailleurs vérifié avec l'autoroute A65.