Avant tout, je voudrais moi aussi exprimer mon plaisir de vous retrouver pour examiner ce premier texte relatif à la protection du pouvoir d'achat des Français, aux mesures que nous pouvons prendre collectivement pour prolonger certains outils tout en garantissant aux Françaises et aux Français de mieux vivre de leur travail.
Comme Bruno Le Maire l'a souligné, la France est l'État européen qui agit le plus pour protéger le pouvoir d'achat de ses concitoyens : le taux d'inflation y est beaucoup plus bas qu'ailleurs grâce au bouclier tarifaire ; le niveau d'intervention y a été le plus élevé lors de la gestion de la crise sanitaire et de ses conséquences économiques et sociales, et il le reste en ce moment par le biais de mécanismes de revalorisation et d'aide à l'égard des ménages les plus fragiles.
Ce texte contient des mesures qui doivent permettre à nos concitoyens de mieux vivre de leur travail. Comme s'y était engagé le Président de la République, nous voulons faire en sorte que, quand elles le peuvent, les entreprises augmentent la part de leurs profits qui revient aux salariés.
Nous vous proposons deux dispositions en ce sens : pérenne, la première consiste à faciliter le partage de la valeur grâce à un régime fiscal et social proche de celui de l'intéressement et sans limite de salaire pour les potentiels bénéficiaires ; ponctuelle, la deuxième passe par la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, dont nous proposons de tripler les plafonds en les portant à 3 000 et 6 000 euros, en conservant les mêmes modalités d'attribution que celles de la prime précédente, plafonnée à 1 000 et 2 000 euros. Précisons que nous avons accueilli avec beaucoup de bienveillance et de manière très positive un amendement adopté en commission, permettant à la fois d'envisager le fractionnement du versement de cette prime unique à l'échelle de l'année, tout comme d'envisager sa modulation en fonction de l'ancienneté des salariés bénéficiaires.
La deuxième mesure, qui fait également suite à un engagement pris par le Président de la République lors de la campagne présidentielle, concerne les travailleurs indépendants : nous proposons de faire baisser le niveau de leurs cotisations maladie par le biais d'un système d'exonérations. Si l'Assemblée nationale et le Sénat acceptent cette disposition, cette diminution se traduira par un gain de pouvoir d'achat de 550 euros par an pour un travailleur indépendant qui se rémunère au niveau du SMIC.
Nous avons prévu un système de lissage pour faire en sorte que les travailleurs indépendants gagnant jusqu'à 1,5 fois le SMIC soient gagnants. Quelque 80 % des travailleurs indépendants – artisans, commerçants, exploitants agricoles – pourront bénéficier de cette baisse de cotisations maladie, être accompagnés et mieux protégés de l'inflation. Soulignons que cette exonération sera intégralement compensée à la sécurité sociale par l'État. Ce point fait partie des discussions, des interrogations qui ont pu naître à l'occasion de l'examen du texte en commission.
Troisième mesure proposée dans le champ du travail et de l'emploi : la revalorisation des minima de branche et donc des conventions collectives. Nous proposons une mesure pour inciter les branches professionnelles à maintenir des minima conventionnels au moins au niveau du SMIC. En réponse aux inquiétudes que j'ai entendu s'exprimer en commission des affaires sociales, je peux vous assurer de l'engagement plein et entier du Gouvernement à mettre en œuvre les dispositions que nous vous proposons d'adopter. Il y a une dizaine de jours, j'ai réuni le comité de suivi des négociations salariales de branche – le précédent avait été présidé par Élisabeth Borne, alors ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion – pour accompagner l'ensemble des secteurs concernés.
Sur cette question de justice sociale, nous proposons donc de créer dans la loi un nouveau critère de restructuration de branches, qui permettrait au Gouvernement de procéder d'office à la restructuration de certaines branches, dès lors que l'une d'entre elles affiche durablement des minima inférieurs au SMIC.
Il est plusieurs écueils que nous devons éviter à l'occasion de l'examen de ces dispositions. Le premier consisterait à poser le principe selon lequel le problème concernerait tous les secteurs. Tel n'est pas le cas : pour la plupart des branches, cette difficulté est transitoire. Elle est liée aux trois revalorisations du SMIC qui sont intervenues en neuf mois – des revalorisations indispensables pour préserver le pouvoir d'achat, mais qui, en raison des délais normaux de négociation, ont conduit de très nombreuses branches à se trouver provisoirement en situation de non-conformité.
Pour illustrer mon propos, je précise qu'après la revalorisation du SMIC intervenue le 1er mai dernier, 145 des 171 principales branches observées par la direction générale du travail (DGT) présentaient au moins un niveau de rémunération inférieur au SMIC. À l'heure où je m'exprime, moins de cent branches se trouvent toujours dans cette situation et la quasi-totalité d'entre elles ont ouvert des négociations pour se mettre en conformité.