Le cancer du sein est le plus fréquent chez la femme : 33 % des diagnostics, près de 60 000 nouveaux cas et 12 000 décès chaque année. C'est aussi la première cause de décès féminin par cancer. Dans 1 % des cas, la maladie frappe des hommes – ne les oublions pas ; le reste du temps, c'est une vie de mère, de sœur, de fille, d'amie que cette annonce bouleverse. Il est vital que l'État soutienne et accompagne ces femmes, qui affrontent non seulement des défis médicaux, mais aussi de lourdes pressions financières, sociales et émotionnelles. Une société juste et solidaire ne doit pas fermer les yeux sur la souffrance de ses membres les plus vulnérables.
Cette initiative du groupe GDR – NUPES a le mérite de soulever le problème du reste à charge pour les patientes atteintes d'un cancer du sein. Cependant, nous avions souligné en commission nos réserves quant au dispositif proposé. Avec l'annulation en février dernier de 10 milliards de crédits et la perspective d'une baisse de 20 milliards supplémentaires, le Gouvernement a décidé de mener une politique de rabot qui s'attaque principalement aux dépenses sociales et risque de toucher les plus fragiles : je pense notamment au doublement de la franchise médicale, au déremboursement des médicaments en fonction des revenus, aux coupes pratiquées dans la prise en charge des ALD, à la sous-indexation des retraites. Si ces décisions portent un grave coup à la solidarité nationale, elles traduisent aussi les contraintes budgétaires qui découlent de la dette de la sécurité sociale et dont il n'est tenu aucun compte dans cette proposition de loi, alors même que la majorité – je l'apprends à l'occasion de cette discussion générale –, par démagogie, la soutient.
De surcroît, le texte contrevient au principe même – la prise en charge de tous les soins médicaux à visée curative – qui a présidé, en 1945, à la création de l'assurance maladie. Rappelons que celle-ci couvre en moyenne 76,8 % des dépenses de santé ; s'y ajoutent les organismes complémentaires. La France est le pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) où le reste à charge des ménages est le plus faible : 8,9 %, contre 14 % en moyenne dans l'Union européenne.
Le cancer du sein nécessite un suivi et des soins coûteux, prolongés. À ce titre, il est considéré comme une ALD, ce qui donne droit au remboursement intégral des soins, notamment de la reconstruction mammaire quand elle est nécessaire. En outre, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 a prévu d'élargir le dispositif 100 % santé aux prothèses capillaires pour les patients traités par chimiothérapie. Les organismes complémentaires contribuent à réduire le reste à charge en remboursant tout ou partie de certains soins de support et des dépassements d'honoraires, même si la question des plafonds demeure prégnante.
Cependant, adopter cette proposition de loi reviendrait à faire aux complémentaires santé un cadeau fiscal sans avoir la garantie, en contrepartie, d'une baisse de leurs tarifs ou d'une extension de leur prise en charge. Séduisant à court terme, le remboursement du forfait journalier, des franchises, des participations forfaitaires ou encore des dépassements d'honoraires ne manquera pas d'inciter les professionnels à appliquer des tarifs de plus en plus élevés, aux dépens, in fine, du contribuable.