Le cancer touche chaque jour près de 1 200 personnes : un Français sur vingt est concerné, soit deux fois plus qu'il y a trente ans. Le cancer du sein représente 33 % des diagnostics de cancer dans la population féminine. En 2023, près de 61 000 nouveaux cas ont été détectés et 12 000 personnes en sont malheureusement mortes, ce qui en fait, chez les femmes, à la fois le cancer le plus fréquent et celui qui entraîne le plus de décès.
Dans la majorité des cas, le développement d'un cancer du sein prend plusieurs mois, voire plusieurs années. Dépisté tôt, il peut être guéri dans neuf cas sur dix, et les séquelles limitées. Je saisis donc cette occasion pour rappeler à toutes les femmes qu'il est crucial de participer aux programmes de dépistage.
Depuis 2004 et le premier plan « cancer », l'État a consacré d'importants moyens à la lutte contre cette maladie. La stratégie décennale 2021-2030, présentée le 4 février 2021 par le Président de la République, constitue ma feuille de route pour les prochaines années. Elle fixe des objectifs inédits : passer en dix ans de 150 000 cancers évitables par an à moins de 100 000, faire reculer la mortalité liée aux sept cancers les plus meurtriers – parmi lesquels celui du sein –, atténuer les conséquences des cancers et des traitements sur la qualité de vie en minimisant les séquelles. Plus des trois quarts des actions issues de la première feuille de route, 2021-2025, financée à hauteur de 1,7 milliard d'euros, commencent déjà à porter leurs fruits.
Le cancer du sein est au cœur de cette stratégie décennale. Pour favoriser une détection précoce, plusieurs actions sont menées, à commencer par le dépistage organisé ; la mise à niveau du parc de mammographes confère à celui-ci un surcroît d'efficacité et de rapidité, tout en encourageant le développement d'outils innovants, comme l'intelligence artificielle. D'autres campagnes de prévention sont également organisées. C'est d'autant plus important que près de 20 000 cancers du sein pourraient être évités chaque année.
Le groupe GDR propose que l'assurance maladie prenne intégralement en charge les soins liés au traitement du cancer du sein. Le forfait journalier hospitalier, le ticket modérateur, la participation forfaitaire et les franchises cesseraient donc d'être appliqués ; le texte prévoit également la prise en charge intégrale de l'ensemble des soins et dispositifs prescrits aux patients, y compris de certains soins de support.
Bien que nous comprenions et partagions l'intention louable de cette proposition de loi, nous devons également considérer les conséquences de sa potentielle entrée en vigueur. Le principal problème de ce texte réside dans le régime différencié qu'il crée sans raison valable pour une pathologie spécifique, et qui contrevient à l'équité de notre système de santé. L'exonération totale des frais de santé pour les femmes atteintes d'un cancer du sein instaurerait une rupture d'égalité entre elles et les patients qui souffrent d'autres pathologies non moins graves. Pourquoi un cancer du sein donnerait-il droit à d'autres conditions de prise en charge qu'un cancer du poumon ou du côlon ? Notre système de santé se doit d'être équitable – comme ont permis de le rappeler les débats que nous venons d'avoir autour des valeurs de la sécurité sociale, lors de l'examen de la proposition de loi constitutionnelle visant à inscrire celle-ci dans la Constitution.
Permettez-moi par ailleurs de rappeler que le système s'efforce d'ores et déjà de limiter le reste à charge pour les patientes, dont la seule préoccupation doit être la guérison. Le cancer du sein est reconnu comme une affection de longue durée (ALD), statut qui permet, pour tous les soins en lien avec cette pathologie, une prise en charge à 100 % du ticket modérateur par l'assurance maladie, selon le barème de remboursement fixé par la sécurité sociale. Les patients bénéficient d'une dispense d'avance de frais, sauf en cas de dépassement d'honoraires, lesquels peuvent cependant être pris en charge par les complémentaires santé. En outre, bien que les personnes touchées par une ALD doivent s'acquitter des participations forfaitaires et des franchises, deux mécanismes protecteurs limitent le reste à charge : l'exonération de ces frais pour les plus précaires, bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (C2S), et leur plafonnement annuel à 50 euros pour les autres.
Le forfait journalier hospitalier, qui s'élève à 20 euros par jour en hôpital ou en clinique, peut être pris en charge par les organismes complémentaires quand les assurés sont couverts par un contrat responsable, ce qui est le cas de 95 % de ces contrats. La prise en charge intégrale des prothèses capillaires pour un panier de soins défini est en cours de concrétisation – nous avions voté cette mesure alors que j'étais député. Enfin, dans le cadre du parcours de soins global des patients traités pour un cancer, un forfait de 180 euros permet de financer des bilans diététiques, fonctionnels, motivationnels, ou des consultations psychologiques.
Nous devons continuer à apporter à tous les patients atteints de maladies graves des solutions globales et équitables, sans privilégier une pathologie au détriment des autres – c'est ma conviction. Il nous faut aussi soutenir les innovations thérapeutiques ; en améliorant les pronostics ainsi que le bien-être des patients, elles nous permettent de regarder l'avenir avec espoir.