J'ai longtemps cherché les mots justes pour l'intervention que je fais ce soir devant vous. Chacun aborde ce débat avec ses convictions, sa foi, ses expériences personnelles, sa culture, son rapport à la mort. Chacun, en tant que législateur, est pleinement conscient de ne pas légiférer pour lui-même ; il est cependant difficile, si ce n'est impossible, de ne pas se projeter personnellement dans ce nouveau droit.
À mon sens, c'est bien un droit nouveau que nous nous apprêtons à créer en France. Non pas un droit absolu, non pas un droit à mourir et surtout pas un droit à donner la mort, mais un droit à pouvoir mettre fin à sa vie, dignement et légalement, quand elle n'est plus que souffrance. Un droit à choisir pour soi. Un droit qui ne dépende pas de l'état de fortune de chacun, comme c'est le cas quand les Français les plus fortunés peuvent se rendre en Belgique ou en Suisse, pays auxquels les plus pauvres ou les plus éloignés de l'Hexagone n'ont pas accès.
La volonté libre et éclairée, voilà la pierre angulaire de l'aide à mourir en même temps que le principal argument que nous opposons à ceux qui y sont farouchement opposés. Personne ne sera contraint d'y recourir, car le respect des croyances et des valeurs de chacun prévaudra toujours, mais la souffrance réfractaire, physique ou psychologique, ne doit plus être une fatalité.
Au sein du groupe Gauche démocrate et républicaine, nous sommes unanimes quant à la nécessité de doter les soins palliatifs de plus de moyens et d'en garantir l'accès pour tous ceux et toutes celles qui souhaitent et peuvent y recourir. Tous sans exception, nous pensons que les professionnels de santé doivent disposer des moyens nécessaires pour accompagner ceux qui souffrent et dont la vie touche à sa fin.
Toutefois, ces soins ne sont ni le remède à toutes les souffrances, ni un préalable obligatoire à l'aide à mourir. Celle-ci ne concernera qu'une minorité : elle ne sera pas ouverte à tous, mais soumise à des conditions strictes, à une procédure rigoureuse. Ce n'est qu'ainsi que nous concevons ce nouveau droit, tout en étant soucieux de ne pas trop en restreindre l'accès, afin que la loi ne soit pas réduite à une lettre d'intention. Même ceux d'entre nous qui sont les plus favorables à cette réforme ont rédigé leurs amendements la plume tremblante, pesant chaque mot, mesurant chaque condition.
Nous avons déposé des amendements visant à supprimer la condition de nationalité ou encore à revenir à la version initiale du texte, qui prenait en considération les souffrances psychologiques au même titre que les souffrances physiques.