Ce texte propose une évolution historique, attendue depuis des décennies par les associations de malades et par la majorité de nos concitoyens. L'avis 139 du CCNE et les travaux conduits l'an dernier par la Convention citoyenne, entre autres, ont démontré que le cadre législatif ne suffisait pas aux situations où un malade à qui il ne reste que quelques semaines ou quelques mois à vivre, sans perspective de guérison, doit supporter des souffrances que rien ne peut soulager. Le projet de loi répond à cette demande : il permet un choix de l'aide à mourir qui n'impose rien à personne et respecte toutes les consciences – un choix qui peut s'entendre comme un acte fraternel et solidaire, fondé sur l'écoute de la volonté des personnes malades.
Rapporteure pour les articles 5 et 6, je concentrerai mon propos sur la définition et les conditions d'accès à l'aide à mourir. L'article 5 vise à ce que soit mise à la disposition d'une personne qui en fait la demande une substance létale « afin qu'elle se l'administre ou, lorsqu'elle n'est pas en mesure physiquement d'y procéder, se la fasse administrer par un médecin, un infirmier ou une personne majeure qu'elle désigne et qui se manifeste pour le faire. Cette dernière ne peut percevoir aucune rémunération ou gratification à quelque titre que ce soit en contrepartie de sa désignation. Elle est accompagnée et assistée par le médecin ou l'infirmier ». La rédaction de cet article place donc le malade au cœur du dispositif : s'il le peut, c'est lui qui doit procéder à l'injection.
L'article 6 définit les cinq conditions cumulatives, citées par Mme la ministre, que doivent remplir les personnes demandant une aide à mourir. Les trois premières sont les suivantes : être majeur, de nationalité française ou résidant de façon stable et régulière en France, atteint d'une affection grave et incurable en phase avancée ou terminale. Dans sa version initiale, le texte mentionnait également un « pronostic vital engagé à court ou moyen terme ». La plupart des membres de la commission spéciale ont jugé ce « moyen terme » subjectif, indéfinissable et susceptible d'exclure des affections comme la maladie de Charcot, dont l'évolution peut être imprévisible. Le CCNE, ainsi qu'un grand nombre de personnes auditionnées, avait signalé les limites de cette expression. Plutôt qu'au temps qu'il reste à vivre, la commission a donc préféré renvoyer à l'avancement de la maladie : cette rédaction plus opérationnelle n'obligera pas les malades à souffrir dans l'attente d'un moyen terme aléatoire.