Intervention de Sarah Legrain

Réunion du mercredi 22 mai 2024 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSarah Legrain :

Nous sommes réunis pour débattre d'un texte visant à réduire la précarité sociale et monétaire des familles monoparentales, qui représentent, rappelons-le, un quart des familles de ce pays et qui subissent une très forte précarisation. Le texte répond à plusieurs de leurs revendications : prolongation du congé maternité, versement des allocations familiales dès le premier enfant et exclusion de la pension alimentaire des ressources prises en compte pour le calcul des APL.

Six mois après la niche de La France insoumise qui a permis d'aborder ce sujet en proposant de déconjugaliser l'ASF, c'est grâce à nos collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine que le sort des mères isolées est de nouveau inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée. Nous arrivons à l'heure de vérité : si le Gouvernement, le Premier ministre Attal et le Président Macron lui-même aiment beaucoup parler des mères isolées, c'est pour l'instant grâce à l'opposition que des mesures d'urgence réclamées par tous les collectifs de familles monoparentales sont mises à l'ordre du jour. Lorsque le MoDem a déposé une proposition de loi visant à défiscaliser les pensions alimentaires, le Gouvernement s'y est opposé et les députés Renaissance ont tout bonnement détricoté le texte.

Pour que l'heure de vérité soit complète, je reviens sur les causes de la précarité contre laquelle la présente proposition de loi vise à lutter, comme un pansement, nous a dit le rapporteur. Les difficultés cumulées par les familles monoparentales ne tombent pas du ciel : elles découlent de politiques dont ces familles sont les premières victimes. Dans 82 % des cas, il s'agit de mères isolées : parce que ce sont des femmes, elles subissent les inégalités femmes-hommes au travail, occupent davantage de contrats à durée déterminée, de temps partiels subis, d'emplois mal rémunérés à horaires décalés. Et pourtant le Gouvernement détricote le code du travail, remet en cause les 35 heures et refuse toutes nos propositions de loi tendant à revaloriser les métiers féminisés, à augmenter le Smic, à indexer les salaires sur l'inflation ou à bloquer les prix alimentaires.

Parce que les mères isolées ne sont pas moins actives mais ont un risque de chômage plus élevé, elles galèrent à concilier recherche d'emploi et charge familiale. Le Gouvernement, avec sa réforme du RSA, impose néanmoins 15 heures d'activité et s'en prend de nouveau à l'assurance chômage en réduisant les indemnités, après avoir imposé une injuste réforme des retraites qui pénalise en premier lieu les carrières hachées des femmes. Ces carrières sont profondément liées au manque de solutions d'accueil des enfants, mais le Gouvernement continue de saper les services publics et de laisser le secteur privé faire du profit sur le dos des bébés. Face à la crise du recrutement de professionnels de la petite enfance, le Gouvernement préfère abaisser le taux d'encadrement, ce qui augmente les risques de maltraitance, plutôt que de revaloriser enfin substantiellement les salaires dans ce secteur. Parce qu'elles ont au mieux un seul salaire pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants, les familles monoparentales souffrent plus que les autres du mal-logement. Or que fait le Gouvernement ? Il rabote les APL et casse la loi SRU en matière de logement social. Ce sont toutes ces mesures antisociales et cette politique générale qui sont à l'origine de la précarité des mères isolées. Et comme cela ne suffisait pas, le Gouvernement a décidé de les stigmatiser lors des révoltes d'il y a quelques mois.

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