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Intervention de Steve Chailloux

Réunion du mercredi 22 mai 2024 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSteve Chailloux, rapporteur :

' Ia ora na, comme on dit en tahitien : bonjour ! La proposition de loi (PPL) pour une meilleure réussite scolaire des jeunes ultramarins grâce à l'apprentissage des langues régionales, déposée à l'initiative de mon collègue député de La Réunion, M. Frédéric Maillot, vise non seulement à préserver les langues régionales mais plus encore à les utiliser comme levier pour améliorer les performances scolaires de nos jeunes dans les territoires d'outre-mer.

Les langues régionales constituent une richesse inestimable pour notre République. Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, notre Constitution dispose que : « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ». Cette reconnaissance constitutionnelle souligne l'importance de ces langues dans notre patrimoine culturel national. En France hexagonale comme dans les pays dits d'outre-mer, les langues régionales sont le reflet de nos diversités et de notre histoire commune.

Dans les pays dits d'outre-mer, la situation est unique et mérite une attention particulière. Plus d'une cinquantaine de langues régionales y sont pratiquées, notamment une trentaine en Nouvelle-Calédonie et une douzaine en Guyane. De nombreux habitants n'ont pas le français pour langue maternelle : c'est le cas de 70 % des enfants en Guyane, et cette proportion est encore plus élevée à Mayotte. Cela illustre la nécessité d'une approche éducative intégrant les langues régionales pour assurer une meilleure inclusion et favoriser la réussite scolaire.

L'enseignement des langues régionales en France a été progressivement renforcé au cours du temps. Première du genre, la loi du 11 janvier 1951 relative à l'enseignement des langues et dialectes locaux, dite loi Deixonne, a permis l'enseignement des langues régionales comme le basque, le breton, l'occitan et le catalan. Au fil des années cette liste s'est allongée pour inclure le corse, le tahitien, les langues mélanésiennes, les créoles et les langues mahoraises. Ces avancées législatives sont autant de pas en avant vers la reconnaissance et la promotion de notre diversité linguistique.

Il ne suffit cependant pas de reconnaître ces langues : il faut aussi les valoriser et les intégrer pleinement dans notre système éducatif. Le texte dont nous discutons aujourd'hui propose une mesure forte : obliger tous les établissements scolaires des académies d'outre-mer à offrir un enseignement de langue régionale à leurs élèves tout au long de leur scolarité. C'est une étape significative pour préserver ces langues mais aussi pour les utiliser comme outils pédagogiques visant à améliorer l'engagement et les performances des élèves.

Il est prouvé que l'enseignement en langue maternelle facilite l'apprentissage et renforce la confiance des élèves en eux-mêmes. Cette proposition de loi pourrait être un moyen efficace de lutter contre les fléaux que sont le décrochage scolaire et l'illettrisme, dont les taux sont particulièrement élevés dans les territoires d'outre-mer. La possibilité donnée aux élèves de commencer leur éducation dans une langue qu'ils maîtrisent, avant de passer progressivement au français, pourrait améliorer leur rapport à l'école et faciliter leur réussite.

L'importance de cette proposition est renforcée par la dynamique récente en faveur des langues régionales. L'adoption en 2021 de la loi dite Molac relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, et la création en 2022 du Conseil national des langues et cultures régionales, témoignent d'un engagement clair de l'État en faveur de la protection et de la promotion de ces langues. Il est maintenant temps de transformer cet engagement en actions concrètes dans nos écoles.

Il est également crucial de noter que cette initiative est en accord avec les dispositions de notre Constitution et avec les décisions du Conseil constitutionnel. L'enseignement des langues régionales, bien que fortement encouragé, reste facultatif pour les élèves et les enseignants, garantissant le respect du principe d'égalité. Le Conseil constitutionnel a clairement établi que cet enseignement ne peut être obligatoire et ne doit pas soustraire les élèves aux obligations générales du système éducatif français. La présente proposition de loi respecte pleinement ce cadre juridique tout en cherchant à maximiser les avantages éducatifs des langues régionales.

En conclusion, cette proposition de loi représente une avancée majeure pour notre système éducatif et pour la reconnaissance des langues régionales dans les territoires d'outre-mer. En soutenant cette initiative, nous affirmons notre engagement à valoriser notre diversité linguistique et à offrir à nos jeunes toutes les chances de réussir. Les langues régionales ne sont pas seulement des vestiges du passé, elles sont des outils vivants et précieux pour l'avenir de nos enfants. Leur intégration dans le système éducatif peut renforcer l'identité culturelle de nos jeunes, améliorer leur réussite scolaire et, en fin de compte, enrichir notre nation tout entière.

Je vous invite donc à soutenir cette proposition de loi pour le bien de la République et de notre jeunesse ultramarine. Ensemble, faisons en sorte que chaque élève, quelle que soit sa langue maternelle, puisse trouver sa place et s'épanouir pleinement dans notre système éducatif. Mauruuru, te arohala rahi – merci, salutations à tous !

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