Intervention de Fabien Balderelli

Réunion du mardi 30 avril 2024 à 16h30
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Fabien Balderelli, sous-directeur des financements innovants, de la dévolution et du contrôle des concessions autoroutières au ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires :

La durée d'amortissement de la concession est de 55 ans. L'ART nous dit que les recettes perçues pendant cette durée sont calibrées pour rembourser intégralement les coûts. Il est donc erroné d'affirmer que l'ART aurait supposé que la durée d'amortissement de la concession soit de 40 ans. Dans le passage que vous avez relevé, l'ART identifie trois sources de financement, à commencer par les concours publics qui seront remboursés dans le cas de bonne fortune.

Ensuite, 275 millions d'euros de dettes sont apportés par des établissements prêteurs. Enfin, 125 millions d'euros de fonds propres sont apportés par les actionnaires d'Atosca, sous forme de capital social ou de dettes subordonnées.

Ces deux sources de financement s'expliquent comme suit. Dans la cascade des revenus, le concessionnaire paye d'abord l'ensemble des charges de la concession (coûts d'exploitation, de maintenance et d'entretien). Les services du concédant et notamment l'autorité chargée du contrôle vérifient que l'ensemble des charges sont effectivement supportées et que l'autoroute correspond, en tout temps, au meilleur service aux usagers pour que ceux-ci circulent de manière commode et en sécurité.

Dans la cascade des revenus, on trouve ensuite les banquiers et les prêteurs. Les 275 millions d'euros de dettes sont prioritairement remboursés aux banquiers et prêteurs. Ces derniers se remboursent par les intérêts inversés de dette et, pour financer ces travaux, le concessionnaire recourt donc à la dette en cours de tirage. Puisqu'il n'enregistrera pas énormément de recettes au cours des premières années, il remboursera essentiellement les intérêts et le capital dans une moindre mesure.

La durée de 40 ans correspond grosso modo à la durée de remboursement envisagée pour ces 275 millions d'euros de dettes.

Toutefois, le financement de l'autoroute suppose d'autres sources et notamment les fonds propres qui seront remboursés ultérieurement, dans la cascade des revenus . Si les recettes sont inférieures aux prévisions, les actionnaires ne seront pas rémunérés en premier lieu, ni les banquiers en second lieu.

Avant d'en arriver là néanmoins, la dette peut être restructurée. Elle peut être étalée ou sa durée peut être allongée. Les prêteurs en sont parfaitement informés et c'est précisément pour cela qu'ils ne prêtent pas sur 55 ans. Si la concession s'exécute mal et que les recettes sont inférieures aux prévisions, les banquiers prévoient – dans le cas nominal – une durée de remboursement de l'ordre de 40 ans, ce qui permet que les 15 ans restants servent à rembourser les fonds propres. En réalité, une partie des fonds propres est remboursée avant 40 ans.

Les différents scénarios de remboursement de dette correspondent à des éléments de stress plus ou moins importants. La dette de la concession de l'A69 est prévue pour être remboursée au plus rapidement, soit en 28 ans. Autrement dit, si l'ensemble des ressources de la concession est strictement affecté au remboursement de la dette et non aux fonds propres, celle-ci est remboursée en 28 ans.

Si toutefois les recettes s'avèrent conformes aux prévisions, les banquiers seront rassurés sur la possibilité d'être remboursés sur une durée plus longue et laisseront ainsi les actionnaires récupérer une partie de la rémunération de leurs fonds propres. Si d'aventure, dans un scénario de stress, les banquiers exigent que l'ensemble des ressources de la concession leur soit versé de manière à être désintéressés le plus rapidement possible de la concession, les actionnaires ne percevront aucune ressource pendant 28 ans. Dès lors, la rentabilité des actionnaires, aujourd'hui espérée à hauteur d'environ 9,5 %, sera beaucoup plus faible.

La logique du financement est de faire en sorte d'articuler le remboursement de la dette avec le remboursement de ces fonds propres, mais la totalité du remboursement des fonds injectés dans la société, c'est-à-dire 275 millions d'euros de dettes et 150 millions d'euros de fonds propres, s'étale bien sur une durée de 55 ans, avec un privilège donné aux prêteurs. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le montant des intérêts exigé est moins élevé que les fonds propres. Plus les ressources sont risquées, plus la rémunération est élevée. C'est normal quand les actionnaires sont les principaux acteurs exposés à de moindres recettes.

Pour en revenir à l'article 29, les éléments concernant la durée de la concession sont indépendants de la capacité de la puissance publique de résilier une concession par anticipation, pour un motif d'intérêt général et avec indemnisation du concessionnaire, avant la fin de sa durée. C'est là un élément de droit commun. Dans toute délégation de service public, la puissance publique peut toujours résilier un contrat avant son terme, en octroyant alors une juste indemnisation au titulaire du contrat. Le mécanisme prévu à l'article 29 comporte bien une durée endogène, c'est-à-dire une durée plus courte dans la mesure où le concessionnaire atteindrait déjà une situation de bonne fortune par rapport à ce qui était prévu.

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