Il me semble que la France dispose déjà d'un outil, le Haut-commissariat au plan. En effet, construire une stratégie techno-industrielle, entre autres en matière d'intelligence artificielle, suppose en réalité de jouer sur deux temporalités. Il faut à la fois être capable de s'adapter dans le très court terme aux surprises et bonds technologiques mais aussi d'établir une vision de très long terme sur ce que devrait être la France dans vingt à trente ans.
Pour y parvenir, il faut au préalable comprendre où sont nos stratégies de niche, ce qui suppose de cartographier nos actifs stratégiques. Il importe de ne plus saupoudrer les financements mais aussi de les cibler le plus intelligemment possible et de devenir incontournables dans certains domaines, pour ne pas être suiveurs des États-Unis dans leur totalité. Là est selon moi le véritable sens de la souveraineté. Ici, on peut notamment penser à la stratégie développée par Israël dans le cyber.
Enfin, il me faut évoquer la question africaine. Aujourd'hui, l'exportation du modèle chinois se réalise sur ce continent. Nous connaissons la lutte informationnelle mise en place par la Russie mais les infrastructures, les réseaux et la connectivité sont déployés par la Chine. J'ai ainsi lu un article récemment dans The Times qui évoquait le lancement d'écoles de formation de dictateurs. Il existe bien une continuité d'exportation du modèle techno-autoritaire chinois en Afrique. De ce point de vue, l'Europe pourrait peut-être agir sur ce continent, en termes de rayonnement, de soft power, d'exportation de nos normes et de nos valeurs phares, selon les modalités du Brussels effect.