Le contexte de la guerre en Ukraine nous enjoint à faire preuve de solidarité et de coopération dans le domaine militaire. Néanmoins, les récents déboires qu'a rencontré l'industrie militaire française face à la Commission européenne ne nous encouragent pas dans cette voie. Le Fonds européen de la défense a en effet délibérément ignoré les consortiums français, plus avancés technologiquement, comme cela a pu être le cas pour le programme EU HYDEF. L'entreprise MBDA avait été désignée coordinatrice du projet TWISTER en 2019, lequel vise à mettre en place un système anti-missiles reposant notamment sur un intercepteur endo-atmosphérique. MBDA a des compétences uniques en Europe dans le domaine de l'hypersonique.
Pourtant la Commission a décidé de lancer un projet similaire, nommé HYDEF, sans choisir MBDA mais le groupe espagnol SENER Aerospace, dont les compétences en matière de missiles hypersoniques ne sont pas prouvées. Un tel revirement témoigne de la volonté d'acheter des armes « sur étagère », qui s'avéreront in fine être américaines ou israéliennes, pour des raisons techniques de compatibilité inter-armées.
Les choix en matière d'armement et d'industrie dans le cadre d'une Europe de la défense pénalisent les industries françaises, pourtant à la pointe du progrès en termes d'armement. Notre part financière au sein des programmes du Fonds européen de la défense n'est que de 18 %, ce qui correspond exactement à notre contribution aux finances de l'Union, et ce alors que nous avons l'une des industries technologiques les plus avancées dans le domaine militaire.
Le but de ce fonds est-il de favoriser les entreprises européennes qui ont du succès ou bien de soutenir celles qui ont du retard ? Nous ne sommes pas opposés au soutien des entreprises européennes qui ont du retard, dès lors que ces décisions ne nous conduisent pas à acheter de l'armement hors de l'Union.
Il est nécessaire de défendre une souveraineté militaire et de protéger nos industries en matière d'armement, sans être fermés à la coopération militaire. Dès lors, que penser de la volonté, en Allemagne, du secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et du Climat de modifier la loi sur l'exportation (REKG) ? Cela pourrait priver la France de ses capacités d'exportation dans le cadre des programmes de coopération industrielle. Comment concilier les politiques intérieures et la promotion des industries européennes ?