Intervention de Martine Lombard

Réunion du mardi 30 avril 2024 à 16h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie

Martine Lombard, professeure émérite de droit public à l'Université Paris-Panthéon-Assas :

La question sur le pronostic vital engagé à moyen terme est à rapprocher de celle sur la collégialité. Je pense qu'il faut supprimer la condition sur le pronostic vital engagé à court ou moyen terme, mais qu'il faut prévoir des conditions renforcées d'appréciation lorsqu'il apparaît que le malade pourrait vivre encore quelques années. Dans ces cas-là, il faudrait un avis conforme de deux ou trois médecins. Le rôle des médecins devrait être de constater que les conditions d'éligibilité sont remplies. Je ne suis pas favorable à une décision collégiale, mais à une succession d'avis allant dans le même sens.

Je voudrais que les directives anticipées soient inscrites dans le dossier médical, mais il serait bon de saisir l'occasion de ce projet de loi pour résoudre un problème. Les directives anticipées sont prétendument opposables, mais elles peuvent être écartées si elles sont manifestement inappropriées. Si le malade a rédigé ses directives à 20 ans et qu'il en a aujourd'hui 70, il peut avoir changé d'avis entre-temps. Le médecin qui décide d'écarter les directives anticipées doit d'abord consulter la personne de confiance, et, s'il n'y en a pas, un proche ou l'aide-soignant qui s'occupe du patient. Je voudrais proposer un amendement en ce sens.

S'il y avait eu des directives anticipées dans le cadre de l'affaire Lambert, le contentieux n'aurait pas duré onze ans. Nous avons besoin des directives anticipées, mais je propose des solutions très nuancées. Le patient se trouve pris dans un « corner » : il faut qu'il soit très gravement malade, mais s'il est trop malade pour communiquer, il ne peut plus obtenir une aide à mourir.

Certains voudraient être aidés à mourir dès lors qu'ils sont atteints de la maladie d'Alzheimer et qu'ils ne reconnaissent pas leurs enfants. Personnellement, je ne suis pas d'accord. Si un malade a changé de personnalité, celle-ci doit se respecter, et je ne vois pas comment imposer une solution à une personne qui ne la veut plus.

Le Conseil d'État a fait beaucoup de recommandations sur les majeurs protégés. Elles ont été minutieusement suivies dans la rédaction du projet de loi, et nous arrivons à un résultat équilibré. La loi permet qu'un majeur protégé puisse demander à bénéficier d'une aide à mourir. Le médecin doit en informer la personne responsable de la protection juridique, qui peut réagir, saisir le juge des tutelles et demander une analyse psychiatrique. Si l'expertise fait apparaître que le patient n'a plus son discernement, c'est un nouvel événement qui conduit le médecin à changer d'avis et à ne pas admettre l'aide à mourir.

Enfin, je ne connais pas de loi qui prévoie l'administration d'un produit létal par un proche.

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