Je suis frappé de voir, depuis un quart de siècle, la responsabilité de la médecine dans l'incapacité de porter attention à la fin de vie. Les soins palliatifs ont toujours été considérés comme accessoires. Ce n'est pas en quelques mois que l'on pourrait restaurer une véritable politique de soins palliatifs.
La loi ne répond qu'à la volonté de 2 à 3 % des personnes, et n'apporte aucune protection aux autres en dehors des promesses intenables. Ce projet est un copier-coller d'une association militante de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), dont les propos sont en décalage total avec la qualité des réflexions antérieures.
L'affaire Vincent Lambert n'a rien à voir avec la fin de vie, puisqu'elle repose sur des conflits familiaux.
Les personnes que j'ai pu voir mourir après une sédation ont eu une morte très douce, qui rassurait l'entourage, ce qui est un progrès considérable. En Belgique, la bureaucratie de l'aide à mourir aboutit à des euthanasies clandestines.
Pour l'entourage, la mort par euthanasie est d'une violence extraordinairement forte. Demander à un médecin d'être présent constitue une première, et me paraît contradictoire avec ce qu'est la médecine.
Les médecins, aujourd'hui, ne sont pas assez nombreux. Il existe une contradiction entre une loi permettant l'aide à mourir et l'incapacité à répondre réellement à des souffrances intolérables.
Une loi doit anticiper l'avenir. Depuis vingt-deux ans, la loi belge a été modifiée une dizaine de fois en allant toujours vers un élargissement. L'ADMD a bien compris que la loi introduisant l'aide à mourir serait un premier pas, qui serait rapidement élargi par d'autres lois. Le problème le plus important est d'anticiper les conséquences d'une loi sur les personnes les plus vulnérables que sont les personnes âgées et les personnes atteintes d'un handicap.
Jamais dans cette loi nous ne parlons de protection. Nous ne parlons que de droit et de liberté, mais la liberté n'a de sens que si elle protège ceux qui ne voudraient pas l'utiliser.
Rédiger une loi sur l'aide à mourir est un des moments les plus difficiles d'une législature. Ses rédacteurs affrontent sans cesse l'universalisation de situations individuelles. Les conséquences d'une telle loi risquent de mettre en péril les avancées des lois précédentes, en mettant la médecine au défi de l'appliquer.