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Intervention de Dr Jean-Marie Gomas

Réunion du mardi 30 avril 2024 à 16h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie

Dr Jean-Marie Gomas, fondateur du mouvement des soins palliatifs en France :

Je souhaite exprimer mon inquiétude de clinicien devant ce projet de loi. Celui-ci est confus, car il refuse de nommer l'euthanasie et le suicide assisté, alors qu'il porte exactement sur cela. L'expression « aide à mourir » est une tromperie vis-à-vis des citoyens et des patients.

Le titre Ier du projet de loi semble inutile, puisque la loi existe déjà. Le terme « accompagnement » vient se substituer à celui de « soins palliatifs » en reprenant la définition qui en est faite depuis 1999. Ce changement de mot poursuit deux objectifs : d'une part, faire valoir le titre II ; d'autre part, introduire la possibilité de la mort programmée dès le début de la maladie dans le projet personnalisé d'accompagnement.

Les critères envisagés dans ce projet de loi sont inapplicables et, pour certains, incontrôlables, comme le pronostic à moyen terme et la souffrance physique ou psychologique. Sous couvert d'une loi de fraternité, l'on ouvre une éligibilité à la mort programmée.

Arrêter son traitement permettrait d'être éligible à la mort programmée, puisque cela peut entraîner une situation insupportable. Soigner, ce n'est pas faciliter la mort programmée. La priorité est de permettre un accès aux soins palliatifs aux centaines de malades qui décèdent tous les jours sans y avoir accès.

Les délais de la procédure sont irréalistes et inadaptés. Ils ne tiennent pas compte de l'état dramatique du système de soins. L'urgence euthanasique n'existe pas. Si vous êtes en détresse terminale, la sédation profonde peut vous donner le calme.

Ce projet de loi est une triple incitation au suicide. La première est l'annonce de la mort programmée dès le début. La deuxième est la participation d'un soignant à chaque étape de la procédure. La troisième réside dans la « date de péremption » du processus. Cette accumulation de facteurs de pression n'existe dans aucun des pays ayant légiféré sur la question. Comment articuler cela avec la prévention du suicide ?

Aucun pays au monde n'a osé émettre l'idée qu'un proche pourrait être la main qui administre la mort. C'est bien mal connaître les familles, les abus de faiblesse et les dissensions que d'imaginer qu'un membre de la famille pourrait aider le malade à s'administrer une mort programmée.

Ma première requête est d'appeler un chat un chat et d'utiliser les bons mots.

D'autre part, il convient de protéger les patients et les soignants, et d'éviter qu'un membre de la famille puisse participer au geste mortifère. Il ne faudrait pas que le pays des droits de l'homme devienne celui de la mort donnée à l'homme.

Enfin, si l'on veut plus d'autodétermination, il faut clarifier le projet de loi et limiter le rôle des soignants. Aucun pays n'a réussi à contrôler la dépénalisation de l'euthanasie. Les critères s'élargissent inéluctablement et l'intention première du législateur disparaît.

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