Nous avons des contraintes de conservation et de logistique, liées au produit. Notre lait n'est pas stockable : il doit être transformé – et donc sortir de la ferme – sous deux ou trois jours, et ceci toute l'année, week-ends et Noël compris. Pour cela, il faut un transport froid, sachant que le modèle agricole français, qui a beaucoup de vertus, fait que presque aucune ferme ne peut remplir un camion en trois jours. C'est une contrainte logistique spécifique à la filière laitière.
Le fait que nous n'ayons qu'un seul client remonte à la création des OP, qui s'est faite en majorité de manière verticale, avec un seul client par organisation. Comme je l'ai dit, la production était alors stable, voire en augmentation : aucun industriel n'avait donc le besoin ni l'envie de prendre de nouveaux producteurs puisque ses besoins étaient assurés, et tout était cadré.
Cela risque d'évoluer très vite. Depuis deux ans, des producteurs rompent leurs contrats pour changer de client. Cela se fait pour l'instant de manière individuelle, mais je pense que les OP devraient gérer ces choses. Reste le poids de l'histoire, qui explique certaines lenteurs : les producteurs sont très attachés à leur client historique – il va falloir faire évoluer les mentalités sur ce point – et les OP sont beaucoup plus récentes que les entreprises qui sont leurs clients. Tout cela va évoluer. Il faudra également se pencher sur la forme juridique des OP, qui n'ont pas été conçues comme des organisations commerciales – il n'y a pas de transfert de propriété avec le producteur pour l'instant. D'autres contraintes techniques existent : les OP ont mandat pour la facturation, mais très peu d'entre elles ont la capacité de la réaliser, faute de disposer des données sur la qualité ou les volumes collectés. Ce sont des sujets interprofessionnels, mais certains acteurs de l'interprofession traînent des pieds quand il s'agit de débloquer les données nécessaires à ce que les producteurs maîtrisent la facturation, ce qui est le cours logique de la démarche.