On peut toujours voir la politique du moins-disant... Souvent, nous n'adoptons pas le bon critère pour juger de l'industrialisation de l'agriculture, qui ne se définit pas forcément par la taille des fermes, mais plutôt par la vitesse à laquelle cette taille change. Je ne suis pas très vieux, et je me souviens que, dans mon département, les fermes laitières s'étendaient sur 40 hectares et produisaient 200 000 litres de lait, alors que la moyenne est aujourd'hui de 800 000 à 1 million de litres de lait, avec soixante-dix ou quatre-vingts vaches et 100 hectares. L'intensification s'est accélérée et la vitesse à laquelle on agrandit les fermes est précisément le critère qui m'intéresse. En Nouvelle-Zélande ou aux États-Unis, les fermes sont très grandes, ce qui est corrélé à l'histoire et la géographie de ces pays – et, de toute façon, nous n'aurons pas de feedlots en France car la topographie ne s'y prête pas. Reste que l'intensification progresse à une vitesse dramatique et qu'il faut la freiner, car c'est l'un des déterminants de l'industrialisation de l'agriculture.
Un autre déterminant est la financiarisation : d'où viennent les capitaux qui financent notre agriculture ? Le modèle, qui était familial et entrepreneurial, bascule vers un modèle sociétaire et capitaliste où ce ne seront plus les agriculteurs qui seront maîtres des outils de production agricole. Des études sur ce sujet montrent clairement que le mouvement s'accélère gravement. On peut donc toujours dire que la taille des fermes est réduite, mais elle s'agrandit et l'effet d'industrialisation est indéniable.