C'est une récupération sémantique et cela n'a rien d'étonnant. Lorsqu'il y a une prise de conscience et une inquiétude sociétales, on y apporte des réponses politiques. Mais on ne va pas se mentir : il y a un effet d'éco-blanchiment. Certains récupèrent la notion de souveraineté alimentaire, mais sans réfléchir aux moyens qu'elle suppose. C'est un exercice politique qui consiste à détourner le sens initial d'une idée pour faire perdurer un modèle économique que l'on n'a pas envie de réorienter. C'est ainsi, du moins, que nous voyons les choses. Il n'y a pour l'instant pas de volonté politique de réorienter l'agriculture pour répondre aux besoins de la population plutôt que de favoriser d'autres intérêts, notamment industriels.
Nous sommes attachés à notre définition de la souveraineté alimentaire car elle a des conséquences démocratiques. Elle implique la mise en place d'outils démocratiques pour que la population se réapproprie son alimentation. Les PAT sont un instrument intéressant à cet égard, mais il reste à les utiliser davantage et plus démocratiquement – ce qui est le cas dans certains endroits.
Les autres définitions de la souveraineté alimentaire conduisent souvent à un repli sur soi, et l'on voit bien quelle instrumentalisation peut en être faite. En tout cas nous combattons ce type d'instrumentalisation, non seulement parce qu'elle est délétère mais aussi parce qu'elle permet une forme d'éco-blanchiment. On fait croire que l'on a pris conscience de l'ampleur des problèmes mais on ne se dote pas d'outils et de moyens pour y répondre véritablement, faute de volonté politique.