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Intervention de Marc Ivaldi

Réunion du mercredi 10 avril 2024 à 15h30
Commission d'enquête sur le montage juridique et financier du projet d'autoroute a

Marc Ivaldi, professeur d'économie à la Toulouse School of Economics :

Je n'aurais pas que peu de choses à ajouter aux propos de monsieur Crozet, auxquels je souscris globalement.

Sur l'estimation du coût, mon chiffre est donc de 6,77 euros, mais il peut évidemment être plus élevé. Dans mon article, j'ai voulu souligner l'importance d'exclure le coût du temps de mon calcul ; le coût de l'autoroute est celui du péage, moins le gain en temps. Je ne pense pas avoir surévalué le temps, puisque je n'ai pris que vingt minutes. Évidemment, une éventuelle augmentation des prix pourrait aboutir à une diminution du trafic et dans ce cas, le chiffre d'affaire du concessionnaire baissera consécutivement, avec le risque qu'il se désengage de la concession.

Je pense que l'autoroute est finalement une bonne solution, notamment parce que l'État n'a pas vraiment les fonds pour investir. En revanche, et nous sommes peut-être tous d'accord, le contrat de concession peut avoir été mal conçu, en particulier si l'on se base sur ceux qui ont été élaborés à l'époque de la privatisation, sous le gouvernement de M. Dominique de Villepin.

Mon école, la Toulouse School of Economics, est connue dans le monde entier pour l'analyse des relations contractuelles entre un concessionnaire et une autorité ; Jean Tirole a d'ailleurs reçu un prix Nobel pour ce travail précis. Il serait donc appréciable que, de temps en temps et avant de signer des contrats de concession, les décideurs politiques s'appuient sur les savoirs existants. Il est assurément possible de réduire les durées de contrats de concession, mais ceux-ci me semblent constituer la bonne solution pour développer des infrastructures.

S'agissant des alternatives ferroviaires, je rejoins tout à fait Yves Crozet. Le problème du train est d'abord celui de la rigidité des horaires. Si vous avez des enfants, vous ne pouvez pas vous rendre par le train à votre travail sur Castres. Un usager prenant le train utilise souvent sa voiture pour se rendre à la gare, puis un autre véhicule, lorsqu'il arrive à Castres ou Toulouse, pour se rendre à l'endroit souhaité. Du fait de ces changements de modes de transport, le temps de transport en train est finalement très élevé.

On peut tout à fait augmenter les fréquences, à condition de les augmenter de manière significative. Il faut d'ailleurs se demander pourquoi cela n'a pas été fait, car rien ne l'empêche. Depuis 20 ans, la région Occitanie dépense environ un milliard d'euros sur le train, pour une part de marché ayant finalement augmenté d'environ 8 ou 9 % à 11 ou 12 %. C'est quand même beaucoup d'argent public dépensé pour un effet très faible.

Le train est une technologie complexe en ce qu'elle nécessite un marché important. C'est un mode très peu flexible, à la différence de la voiture, a fortiori si la voiture électrique se développe et supprime les problèmes de pollution.

L'un des avantages d'avoir des infrastructures adaptées, comme une route à deux fois deux voies, est d'augmenter la fréquence des services de cars qui jouent alors le rôle de transports en commun. L'autoroute devrait le permettre et il faudrait la développer. Ce type de recommandations pourrait être demandé aux concessionnaires, avec une tarification qui serait fonction de l'utilisation du car.

En conclusion et à mon sens, ne pas faire l'autoroute aujourd'hui revient, à coup sûr, à créer des situations de congestion dans 20 ou 30 ans et à prendre le risque, lorsque surviendra cette congestion, de ne plus avoir le temps de bâtir l'autoroute. Telle est l'équation de la décision actuelle.

Il y a de fortes chances que les personnes continuent d'utiliser massivement des véhicules individuels, des bus ou des cars.

Je rappelle enfin que la technologie progresse, au prix d'investissements considérables. La France travaille déjà sur la technologie de l'autoroute électrique (par induction) et même sur des véhicules électriques volants qui apparaîtront très probablement dans très peu de temps.

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