Intervention de Marc Hecker

Réunion du mercredi 10 avril 2024 à 11h00
Commission des affaires étrangères

Marc Hecker, directeur-adjoint de l'Institut français des relations internationales (IFRI) et rédacteur en chef de la revue Politique étrangère :

Alain Antil, spécialiste de la Mauritanie à l'IFRI, pourrait vous répondre de manière plus détaillée que je ne vais le faire. Lorsqu'un sanctuaire djihadiste se crée à l'étranger, il est impossible de régler le problème en envoyant des policiers pour qu'ils arrêtent les leaders. Nous avons donc besoin de moyens militaires pour détruire ce sanctuaire, et si les armées locales n'en ont pas les moyens, une intervention internationale est possible. La France a d'ailleurs agi dans des cadres très précis, sur demande d'intervention des autorités locales, avec l'autorisation de l'ONU et en coalition lorsque c'était possible.

Par ailleurs, l'approche française n'a pas été exclusivement militaire. Elle s'est efforcée d'implémenter la logique « 3D », en combinant la diplomatie, le développement et la défense, même si effectivement le pilier militaire était dominant. Les militaires ne prétendent pas détenir la solution. Ils peuvent obtenir des résultats tactiques et opérationnels en éliminant des émirs et éventuellement des cadres intermédiaires ou en détruisant des camps d'entraînement, mais cela ne fait que créer des opportunités politiques. Il appartient ensuite aux autorités locales de s'en saisir et elles ont eu le plus grand mal à le faire au Sahel, ce qui a abouti à la situation que l'on connaît.

Effectivement, pour des conflits qui ont des dimensions sociale, politique et religieuse très fortes, la solution n'est pas exclusivement militaire.

Pour ce qui est de la Mauritanie, qui est souvent mise en avant, un aspect plus sombre mérite d'être signalé. Je n'ai pas de références précises permettant de l'accréditer mais il semble que, à une certaine période, des négociations aient eu lieu en vue de conclure une trêve avec des groupes terroristes pour qu'ils épargnent le pays. Cela ouvre d'ailleurs plus largement la question : faut-il négocier avec les groupes djihadistes et, si oui, dans quelles conditions ?

Une aide a également été proposée par la France à la Mauritanie, avec notamment le soutien des unités mobiles, qui se sont avérées assez efficaces. La Mauritanie est souvent mise en avant comme un exemple mais je n'irais pas jusqu'à dire que la menace djihadiste y a été éradiquée. Il faut toujours être extrêmement prudent à ce sujet car éradiquer une idéologie est très compliqué. En général, il suffit que les conditions politiques et sociales soient réunies ou qu'un choc géopolitique se produise pour que cette mouvance ressurgisse.

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