Depuis sept ans, vous sabrez les recettes fiscales et versez le champagne aux entreprises. C'était donc cela, le projet que le Président hurlait de ses vœux, à Lyon, en 2017 : open bar pour les plus riches et les multinationales, tandis que les autres devront attendre le ruissellement ! Évidemment, il n'y a pas eu de ruissellement, et le déficit s'est creusé, pour atteindre 5,5 % en 2023.
Vous mettez ce déficit sur le compte d'un retournement conjoncturel. Toutefois, le HCFP vous a opposé un démenti : en 2023, la croissance a été conforme aux prévisions inscrites dans la loi de finances. Ce qui explique le déficit, c'est donc non pas la conjoncture, mais les 52 milliards d'euros de baisses d'impôts que vous avez opérées depuis 2017.
Cette politique a d'abord bénéficié aux ultrariches, à qui vous avez accordé 3,2 milliards d'euros de baisses d'impôts, en transformant l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI) et en instaurant la flat tax sur les revenus du capital, désormais moins taxés que ceux du travail. Grâce à vous, les 1 % les plus riches ont ainsi gagné 3,3 % de pouvoir d'achat entre 2017 et 2022, soit quatre fois plus que les 5 % les plus modestes.
Quant aux entreprises, elles ont bénéficié d'une baisse de 11 milliards de l'impôt sur les sociétés et d'une diminution de 14 milliards des impôts de production, auxquelles s'ajoute une nouvelle réduction de la CVAE, de 1 milliard, dans le budget de 2024. Non seulement vous baissez les impôts des entreprises, mais vous les subventionnez massivement : des aides leur sont octroyées chaque année à hauteur de 157 milliards, la plupart sans conditionnalité ni contrepartie. Il s'agit, entre autres, des exonérations de cotisations sociales – 80 milliards –, du CIR – 7,3 milliards – et de l'aide aux employeurs pour l'embauche d'alternants – 3,3 milliards. Le « quoi qu'il en coûte » est fini pour les ménages, mais vous continuez à biberonner les entreprises !
Fatalement, le déficit est bien plus important que prévu en 2023. Or vous expliquez désormais aux Français qu'ils doivent se serrer la ceinture ! Alors qu'ils ont déjà encaissé de devoir travailler deux ans de plus pour partir à la retraite, vous projetez de durcir les conditions d'ouverture des droits à l'assurance chômage, notamment en allongeant le délai de carence avant indemnisation.
Et que dire de la situation de l'hôpital ? En 2023, 40 % des établissements privés étaient en déficit. Quant au déficit cumulé des trente-deux centres hospitaliers universitaires (CHU), il a atteint 1,2 milliard d'euros, soit trois fois plus qu'en 2022. Les conditions de travail des professionnels et les conditions d'accueil des patients sont dégradées.
Vous aggraverez encore la situation, puisque vous prévoyez 20 milliards de coupes budgétaires en 2024 et 27 milliards en 2025 ! C'est un choc pour les dépenses publiques, dont vous refusez de préciser les conséquences, mais qui détériorera plus encore nos services publics, notre protection sociale et l'accompagnement des Français face au dérèglement climatique.
Pourtant, le chemin existe pour retrouver un équilibre budgétaire, tout en finançant nos besoins sociaux et écologiques. Seulement, pour cela, il faut du courage : le courage de mettre à contribution les profiteurs de crise – nous vous avons proposé d'instaurer un ISF climatique ou la contribution Pisani-Ferry –, le courage de taxer les groupes pétrogaziers, que vous avez toujours épargnés, malgré leurs profits indécents. Vous n'avez taxé que les producteurs d'électricité, et bien en deçà de vos savantes prédictions, au moyen de la contribution sur la rente inframarginale de la production d'électricité (Crim). Vous avez même refusé de prolonger la petite taxe sur les producteurs d'énergies fossiles, dite contribution temporaire de solidarité ; vous ne l'avez mise en place que pour les résultats réalisés en 2022.
Pendant ce temps, toute l'Europe mettait à contribution les groupes pétrogaziers : non seulement le Royaume-Uni, mais aussi l'Italie et l'Espagne qui, comme nous, n'ont pas d'exploration-production sur leur territoire. La taxe italienne créée par Mario Draghi a rapporté 2,8 milliards d'euros, tandis qu'en France, le PDG de TotalEnergies s'est réjoui de diriger une « machine à cash » ! Vous vous dites ouverts et sans tabou à ce sujet ; nous verrons bien si vous voterez la taxe exceptionnelle que nous vous proposerons en la matière.
Le courage, c'est aussi de faire des économies.