Quelles sont, madame la ministre, vos priorités en matière numérique ? Ma question fera écho à celle de mon collègue Andy Kerbrat. S'agit-il de nous protéger des ingérences étrangères ou de protéger les citoyens ?
Les stratégies, plans et annonces ont tous conduit aux mêmes résultats : la multiplication des données collectées – le nombre de caméras de voie publique contrôlées par la police ou la gendarmerie aurait crû de 50 % en dix ans – et la sophistication de la surveillance de masse, ces caméras étant devenues des armes plus redoutables encore. Lors des débats sur le projet de loi relative aux Jeux olympiques et paralympique, vous avez en effet introduit la possibilité d'embarquer des caméras associées à de l'intelligence artificielle à bord de drones – cheval de Troie menaçant aussi bien nos libertés individuelles que notre intimité : croisées avec d'autres fichiers, les données ainsi collectées permettront sans peine d'identifier des individus lors de manifestations, en particulier si un gouvernement plus illibéral que le vôtre arrive un jour au pouvoir.
Il ne s'agit pas de fiction : cela se passe déjà dans d'autres pays. Sachant que le ministre de l'intérieur demandait sans honte aux parlementaires, il y a à peine un an, les mêmes moyens pour surveiller des militants que pour lutter contre le trafic de drogue ou contre le terrorisme, il y a de quoi d'inquiéter pour nos libertés politiques.
La vidéosurveillance nous expose en outre à une surveillance étrangère. Je cite à ce sujet la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) : « En 2015 plus d'un tiers des équipements de vidéoprotection […] étaient importés de Chine, mais des acteurs états-uniens, allemands et suédois sont également présents. De fait, si plusieurs leaders mondiaux en matière de sécurité électronique, de gestion des identités d'accès et de cybersécurité sont français, notre pays ne dispose pas d'acteurs de cette taille pour les équipements vidéo. » Pour se protéger d'ingérences étrangères, il y a mieux !
Madame la ministre, quand renoncerez-vous à déployer des techniques qui nous aliènent et restreignent nos libertés plus qu'elles ne nous protègent ?