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Intervention de René Pilato

Séance en hémicycle du jeudi 2 mai 2024 à 9h00
Améliorer le repérage et l'accompagnement des personnes présentant des troubles du neurodéveloppement et favoriser le répit des proches aidants — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRené Pilato :

Nous pensons à tort qu'il suffit d'ouvrir les yeux pour percevoir le monde qui nous entoure. Si notre œil capte l'information lumineuse par le biais de la rétine, c'est notre cerveau qui nous permet de reconstruire l'image. Ainsi, une lésion cérébrale peut causer des difficultés majeures à visualiser une scène alors que nos yeux, eux, sont parfaitement sains. Ces troubles, dits neurovisuels, empêchent de détecter, de reconnaître ou de localiser dans l'espace les objets et les visages. Ils peuvent passer inaperçus ou être confondus avec ceux des apprentissages, auxquels ils sont souvent associés : la dyslexie, la dysplasie, les troubles du comportement, le trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH).

Ces troubles ne sont pas irréversibles. Si l'on ne peut pas faire grand-chose face à une lésion de l'œil, lorsque c'est le cerveau qui est lésé, il est tout à fait possible de restaurer la vision. Grâce à la plasticité cérébrale et à une rééducation adaptée et intensive, il est désormais possible de contourner cette lésion et d'apprendre, ou de réapprendre, à voir. Cette prise en charge est possible chez les nouveau-nés dès l'âge de 1 mois, ainsi que chez les adultes après un accident vasculaire cérébral (AVC).

Pour les troubles de l'audition, il est conseillé d'intervenir avant l'âge de 1 an, afin d'éviter l'apparition de troubles du développement du langage. Une perte auditive non traitée peut compromettre l'aptitude de l'enfant à parler et à comprendre la langue, donc entraver son développement verbal, social et émotionnel. Ce handicap peut entraîner l'échec scolaire, les moqueries des autres enfants ainsi qu'un isolement social et des difficultés affectives. Enfin, une jaunisse ou un manque d'oxygénation du cerveau peuvent entraîner des dommages à ce dernier. Il convient donc de suivre particulièrement les prématurés, à qui une bonne oxygénation a pu faire défaut.

Dans ce texte, il aurait été judicieux de commencer par le titre II. Selon moi, les articles 5 et 6 devraient se situer en première et deuxième positions. Pour améliorer le repérage des troubles du neurodéveloppement, il importe d'inclure le repérage des troubles neurovisuels, qui touchent environ 5 % des enfants, et des troubles de l'audition, qui concernent environ 2 % des enfants. En 2023, 678 000 bébés sont nés en France, ce qui signifie qu'environ 34 000 enfants présentent des troubles neurovisuels et 13 500 des troubles de l'audition. Nous proposons donc d'avancer la date du premier examen obligatoire de repérage aux 9 mois de l'enfant – en particulier pour les troubles de l'audition –, et d'adjoindre aux rendez-vous préventifs mensuels des six premiers mois de l'enfant un volet systématique de détection des troubles neurovisuels.

Il manque, dans cette proposition de loi, la dimension de réparation entre 0 et 3 ans – le texte ne mentionne pas les soins de réparation. C'est pourtant tout le sens du travail du docteur Sylvie Chokron : réparer le plus tôt possible pour corriger les handicaps. Pour des progrès plus rapides chez le bébé et l'enfant, une prise en charge pluridisciplinaire par un orthoptiste, un orthophoniste, un neuropsychologue, un ergothérapeute et un psychomotricien permettrait de travailler réellement à une inclusion réussie à l'école – les handicaps restants seraient bien moindres – et de préserver les couples dont un enfant est handicapé : dans 90 % des cas, le couple explose et c'est la mère qui assume. Cette absence d'attention portée à la réparation conduisait Olivia Cattan, présidente de l'association SOS autisme France, à affirmer : « C'est bien, on va dépister votre enfant mais on ne va pas trouver de professionnels de santé pour le prendre en charge. Donc ça va être encore aux parents de tout faire. »

En ce qui concerne les articles 1 à 4, nous sommes favorables au maillage territorial des dispositifs d'inclusion. Quant à l'article 7, il porte une grave atteinte au droit du travail. L'introduction de telles dérogations dans le droit commun constitue une dérive majeure qui pourrait être étendue à d'autres dispositifs et à d'autres secteurs d'activité. Pourquoi avoir gâché le texte avec cet article ?

Notre vote dépendra de la date des premiers examens de repérage, qui gagneraient à être généralisés le plus tôt possible afin de faire du moment scolaire celui d'une réelle inclusion, et du devenir de l'article 7. Alors que vous proposez plusieurs dérogations au droit du travail qui exposeront les personnes chargées de l'accompagnement à des risques professionnels, nous défendons le statut d'AESH.

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