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Intervention de Fatiha Keloua Hachi

Séance en hémicycle du jeudi 2 mai 2024 à 9h00
Discussion d'une proposition de loi — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFatiha Keloua Hachi :

« Mes bras serrés c'est vous, toutes les petites filles dans le silence. Mon cou, ma nuque penchée, c'est vous, tous les enfants dans le silence. Mes jambes bancales, c'est vous, les jeunes hommes qui n'ont pas pu se défendre. Ma bouche tremblante, mais qui sourit aussi, c'est vous, mes sœurs inconnues. »

Ces propos courageux, forts de sens et glaçants à la fois, ce sont ceux de Judith Godrèche lors de la cérémonie des Césars, en 2024. En France, entre le 1er janvier et le 1er avril 2024, ce sont 40 000 enfants qui ont été agressés ou violés. Ce chiffre ne peut pas, et ne doit pas, nous laisser indifférents. Les mineurs, et particulièrement les enfants très jeunes, sont souvent plus fragiles car incapables de se défendre. Leur jeune âge devient alors un critère de vulnérabilité constant et, malheureusement, ils se retrouvent exploités par ceux qui cherchent à instaurer une forme de domination malsaine. Le cinéma, la mode et le monde artistique, de manière générale, ne sont pas hermétiques à ce qui touche notre société.

La domination sur les enfants se fait de manière systématiquement abusive d'un point de vue physique, sexuel ou professionnel.

Parce que cette domination existe et parce que, depuis trop longtemps, l'omerta et l'impunité perdurent, nous avons, nous adultes responsables et parlementaires, la charge de la protection de celles et ceux qui ne doivent plus jamais subir cela ni dans le monde artistique ni ailleurs.

Depuis 2017, les #MeToo se sont succédé – en commençant par #MeTooCinéma aux États-Unis – à l'initiative de victimes courageuses, ces mouvements, qui ont eu la force de dire stop, ont permis progressivement de libérer la parole. Mais est-ce fini ? Non, car notre société a depuis trop longtemps intériorisé des codes patriarcaux, misogynes et masculinistes.

Quel est l'accueil de ces mouvements de libération de la parole ? Quel message adressons-nous lorsque des femmes courageuses déclarent qu'elles ont été sous emprise, violentées, abusées lorsqu'elles étaient mineures et que nous regardons ailleurs ? Quel message envoie-t-on lorsque 86 % des plaintes pour violences sexuelles sont classées sans suite, et que seulement 2 % des victimes portent plainte ?

Que dire aux mineurs ? Comment peuvent-ils se défendre ? De quelles armes disposent-ils pour dire non à une scène dans laquelle ils seraient trop dénudés, à une main qui descendrait trop bas, à des moments d'intimité en coulisses, pour dire non à celui sans qui aucune carrière ne peut voir le jour ?

Dans le cinéma comme ailleurs, l'adulte devrait être un exemple, un repère, une personne de confiance pour chaque mineur et, pourtant, ce n'est pas le cas.

Quand Judith Godrèche est intervenue aux Césars, elle ne s'est pas exprimée uniquement pour elle, mais pour au moins 2 000 victimes en quatre jours, pour plus de trois millions de femmes et d'hommes qui disent avoir été victimes de violences sexistes et sexuelles lorsqu'ils étaient enfants. Elle parle pour tous ceux qui, enfants, ont subi dans le silence ces violences sans jamais pouvoir en parler.

Grâce à la présente proposition de résolution, nous pouvons montrer à ces mineurs que nous souhaitons les aider, que nous les croyons, que nous les écoutons car le silence d'une violence ne doit jamais construire ces enfants. Nous pouvons enfin commencer à faire la lumière sur les pratiques, les violences et toutes les dérives depuis trop longtemps internalisées dans un secteur qui a vécu dans le silence.

Stop à l'impunité ; stop aux agresseurs ; stop à l'omerta. Les socialistes se placent toujours du côté des victimes. Nous le répétons à tous ces mineurs : nous vous entendons et nous vous croyons. Nous voterons pour cette proposition de résolution.

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