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Intervention de Christine Arrighi

Séance en hémicycle du lundi 29 avril 2024 à 15h00
Discussion d'une proposition de loi — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Arrighi :

La proposition de loi de notre collègue Lionel Causse vise à résoudre les problèmes que soulève le pouvoir discrétionnaire dont bénéficie le Haut Conseil de stabilité financière, ce pouvoir ayant pour effet de soustraire au débat public les évolutions qu'il décide, alors même que l'accès au crédit immobilier intéresse plusieurs millions de nos concitoyens.

Malgré la technicité des travaux du HCSF, je suis convaincue de l'importance, pour la représentation nationale, de débattre du fonctionnement et des missions de cette autorité, dont les récentes décisions en matière de fixation des conditions d'octroi de crédit ont fait l'objet de commentaires pour le moins contrastés.

Je rappelle que le Comité européen du risque systémique (CERS), chargé de la surveillance macroprudentielle au niveau européen, précise que l'autorité macroprudentielle doit bénéficier d'une indépendance opérationnelle vis-à-vis des organes politiques et de l'industrie financière. Cette préconisation n'est pas tout à fait respectée, puisque le ministre de l'économie et des finances, qui est une autorité politique, est membre de droit du HCSF, qu'il préside d'ailleurs.

Si cette présence d'une autorité politique n'a pas entravé jusqu'à présent l'indépendance du HCSF – la voix de Bruno Le Maire n'est peut-être pas suffisante pour lui permettre d'imposer ses vues –, l'instance saura bien évidemment composer avec la présence de parlementaires. Celle-ci garantira à la fois sa nécessaire indépendance et le besoin de transparence vis-à-vis des Français, ainsi représentés par leurs élus.

L'extension de la composition du HCSF aux parlementaires traduit une volonté légitime de réinscrire ses décisions dans le débat public et de diminuer la nature discrétionnaire de ses pouvoirs. Lors de l'examen du texte en commission, nous avons soutenu cette mesure et proposé des amendements allant dans le même sens. Aujourd'hui, nous vous proposerons un amendement visant à assurer une représentation au sein du HCSF équilibrée en genre et en nombre entre les deux chambres du Parlement.

L'article 2 concerne l'assouplissement des conditions d'accès aux prêts immobilier. C'est, en quelque sorte, le cœur du réacteur.

Il est évident que notre pays fait face à une crise du logement. Les taux d'intérêt sont passés de 1 % en 2021 – niveau historiquement bas – à 4 % aujourd'hui. Cette situation appelle de notre part des réponses adaptées et durables. La solution qui consiste à permettre de passer outre les limites du taux d'effort et de la durée d'emprunt actuellement en vigueur – respectivement 35 % et vingt-cinq ans – n'est pas la bonne. Elle nous expose en effet à des situations de vulnérabilité. Plusieurs orateurs ont évoqué le risque d'une crise financière, dont les conséquences sont bien connues, mais l'auteur de la proposition de loi semble les avoir oubliées – je pense à tous les drames humains qui y sont associés.

Je rappelle aussi que les banques ont déjà la possibilité de déroger à ces limites, à hauteur de 20 % de leurs dossiers tous les trois mois. Or elles font très peu usage de cette faculté. Dès lors, pourquoi l'étendre ?

Nous devons plutôt agir sur les coûts d'approvisionnement des matériaux de construction afin de réduire les coûts d'accès à la propriété – les élections européennes sont là pour nous le rappeler. Nous devons également favoriser la construction de logements. À cet égard, l'épargne populaire des Français, par exemple celle du livret A, doit être davantage mobilisée et consacrée prioritairement à cet objet, non au financement de l'industrie de la défense ou du nucléaire – vous soutiendrez, j'en suis sûre, ma proposition de loi en ce sens. La solution ne peut être de favoriser le surendettement, ce qui induirait en outre un risque inflationniste.

En conclusion, il aurait été vraiment souhaitable qu'un travail parlementaire plus substantiel soit réalisé sur l'accès au logement, sur les parcours résidentiels, sur les emprunts contractés par les ménages et sur le rôle de la surveillance macroprudentielle des banques en matière de crédit immobilier. Nous aurions pu notamment disposer d'une étude d'impact de la mesure proposée sur le système financier. Or, une fois encore, le Gouvernement avance masqué, au mépris de la démocratie parlementaire. Plutôt qu'un projet de loi qui aurait pu être l'occasion d'un débat démocratique au sein de notre assemblée, vous soumettez une proposition de loi qui nous empêche de débattre et, surtout, de nous prononcer réellement sur cette question.

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