La loi Taquet était une loi attendue puisqu'elle venait rattraper une situation extrêmement dégradée dans la protection de l'enfance. Cette loi posait quelques protections élémentaires, notamment l'interdiction des sorties « sèches » à 18 ans et de l'hébergement d'un mineur à l'hôtel ainsi que la nécessité d'un agrément pour les assistants familiaux. Il s'agissait même du minimum attendu de l'ASE.
Pourtant, le temps pris pour publier les décrets, l'absence de certains d'entre eux et le fait que même le rapport sur la loi soit présenté sous forme de tableau sans un approfondissement de l'effet des mesures me semblent dire en filigrane à quel point la volonté politique indispensable à la protection de nos enfants n'est pas tout à fait présente. Or, il s'agit d'enfants qui sont confiés à l'État, précisément parce que leurs familles sont défaillantes.
En réalité, alors que nous sommes les parents de substitution des enfants concernés, même le rapport d'application de cette loi ne dit pas combien nous traitons avec importance et considération la situation de ces enfants.
Le premier élément sur lequel je souhaite mettre l'accent, est l'absence de base de données nationale des agréments des familles d'assistants familiaux. J'entends qu'il y ait des problèmes informatiques. Je rappelle cependant qu'il s'agit de la sécurité des enfants placés. Par conséquent, il ne saurait être question d'accepter, parce que la famille s'est déplacée d'un département à l'autre, une absence de suivi ou de considération de l'agrément de ces familles.
En deuxième lieu, je déplore le nombre de dérogations pour les mineurs qui sont encore hébergés aujourd'hui à l'hôtel. Nous avons évoqué le cas de Lily qui s'est suicidée, après avoir passé cinq mois à l'hôtel. Quel État social permet ainsi qu'une enfant de 15 ans soit logée seule, pendant plusieurs mois à l'hôtel ?
J'insiste sur ce point parce que dans la mission d'information sur les urgences psychiatriques que nous menons avec Nicole Dubré-Chirat, les problématiques de l'ASE et de la PMI pèsent de manière conséquente sur la santé psychique de ces enfants, qui manquent de soins, de suivi et d'accompagnement.
Enfin, en France, 40 % des personnes sans domicile fixe de moins de 25 ans sont issues de l'ASE, car les sorties sèches à 18 ans sont encore trop nombreuses. Nous devons absolument avoir une volonté politique bien plus affirmée sur ces questions.