Trois décrets d'application de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, dite « loi Taquet », ont été publiés au Journal officiel du 19 février 2024, plus de deux ans après la promulgation du texte.
Les deux premiers décrets, n° 2024-117 et n° 2024-118 du 16 février 2024, précisent les modalités de mise en œuvre du mentorat ainsi que le dispositif de parrainage au profit des mineurs et des majeurs de moins de 21 ans, pris en charge par l'aide sociale à l'enfance (ASE).
Le troisième texte, le décret n° 2024-119 du 16 février 2024, précise les dérogations à l'interdiction d'hébergement à l'hôtel des personnes mineures ou âgées de moins de 21 ans, prises en charge au titre de l'ASE, créée par l'article 7 de la loi.
La publication tardive et relativement récente de ces décrets démontre bien l'intérêt de réaliser un rapport d'application des lois votées par le Parlement. L'importance des sujets que recouvre cette loi rend incontournable l'examen de sa mise en application.
Conformément à l'article 145-7 du Règlement de l'Assemblée nationale, ce travail est d'autant plus important que cette loi s'est inscrite dans la lignée de plusieurs missions parlementaires : le rapport de la mission d'information sur l'ASE, publié le 3 juillet 2019, et celui de ma collègue Peyron Pour sauver la PMI, agissons maintenant de mars 2019, qui a été remis au Gouvernement en juin 2019.
Ces travaux ont permis d'enrichir significativement le texte lors de son examen à l'Assemblée nationale et au Sénat. Fort heureusement, la majorité des quarante-deux articles que compte la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, est entrée en vigueur, notamment parce que la plupart des mesures étaient d'application directe.
Pour autant, nous sommes contraints de déplorer, à l'occasion de ce rapport d'application de la loi, que la publication des décrets d'application nécessaires à l'entrée en vigueur de certains articles pourtant importants a beaucoup tardé. Ainsi, les mesures relatives à la petite enfance ne sont, pour l'essentiel, toujours pas en vigueur.
Nous résumerons donc ici, en premier lieu, les avancées permises par la loi et qui sont entrées en vigueur, avant d'évoquer celles entrées en vigueur tardivement. Nous détaillerons enfin les mesures qui ne sont pas entrées en vigueur, au sujet desquelles nous devons collectivement rester attentifs dans la perspective d'un prochain rapport d'évaluation de la loi, que nous appelons de nos vœux.
Plusieurs dispositions ne nécessitant pas de mesures réglementaires d'application ont été rapidement effectives. Il s'agit, notamment, des dispositions relatives à l'organisation de la justice ou à l'office du juge en matière d'assistance éducative, définies à l'article 26. Ce texte prévoit l'audition systématique du mineur capable de discernement par le juge, et la désignation d'office ou à la demande de l'ASE, d'un avocat pour l'enfant capable de discernement, lorsque son intérêt l'exige.
Les mesures relatives à la rémunération des assistants familiaux, prévues à l'article 28, ont été mises en œuvre rapidement. Le décret n° 2022-1209 du 31 août 2022 a détaillé les nouvelles modalités de détermination de la rémunération, qui se sont appliquées dès le 1er septembre 2022.
La procédure de traitement des informations préoccupantes prévue à l'article 24, a également été effective fin 2022, avec le décret n° 2022-1697 du 29 décembre 2022 et le décret n° 2022-1698 du 30 décembre 2022, portant respectivement sur l'information des personnes ayant signalé une information préoccupante, et approuvant le référentiel national d'évaluation des situations de danger ou de risque de danger pour l'enfant.
S'agissant des dispositions relatives à la gouvernance, la refonte des instances existantes au sein d'un groupement d'intérêt public (GIP) prévue à l'article 36, est pleinement effective depuis le 1er janvier 2023. La convention constitutive du GIP France enfance protégée a été approuvée par l'arrêté du 10 décembre 2022.
Le décret n° 2022-1729 du 30 décembre 2022, a par ailleurs redéfini les missions du Conseil national de la protection de l'enfance (CNPE), ainsi que la composition de ses cinq collèges.
En ce qui concerne l'échelon départemental, l'article 37 avait prévu la mise en place, à titre expérimental et dans les départements volontaires, d'un comité départemental pour la protection de l'enfance (CDPE). Le décret n° 2022-1730 du 30 décembre 2022 est venu préciser la composition du CDPE et déterminer ses modalités de réunion et d'organisation ainsi que son articulation avec l'observatoire départemental de la protection de l'enfance. La liste des dix départements volontaires, que nous saluons, a également été précisée par un décret du 29 mars 2023. Ces départements sont les Bouches-du-Rhône, le Cher, la Drôme, l'Eure-et-Loir, le Loiret, le Maine-et-Loire, le Nord, les Pyrénées-Atlantiques, le Pas-de-Calais et la Somme.