Je me félicite de l'occasion qui m'est donnée de répondre, en toute transparence, aux questions de votre commission d'enquête. Outre cela, je tirerai de vos travaux les enseignements utiles pour continuer d'améliorer l'efficacité des politiques publiques menées dans les outre-mer par mon ministère, souvent dans un contexte interministériel, y compris sur ces sujets.
Le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires est chargé de la prévention des risques que nous avons mission de cerner et de quantifier pour mener des politiques de prévention adaptées, alors que le réchauffement climatique aggrave la fréquence et l'intensité de certains phénomènes naturels dangereux. Nous agissons à la fois quotidiennement et sur le long terme pour assurer à la France une résilience face aux risques, limiter l'impact de la dégradation de notre environnement sur notre santé et éviter le gaspillage.
J'ai précisé en octobre dernier que nous devions nous adapter à la trajectoire de réchauffement de référence pour l'adaptation au changement climatique reposant sur le scénario tendanciel du Groupe d'experts inter-gouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) qui anticipe une augmentation de 4 degrés Celsius en France métropolitaine en 2100. Sur cette base, nous sommes en train de bâtir le troisième plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC-3) ; il sera soumis à la consultation du public dans les prochaines semaines. Ce plan comprendra bien sûr un important volet relatif à la prévention des risques naturels majeurs sur l'ensemble du territoire. Une attention particulière sera portée à la bonne prise en compte des territoires ultramarins, soumis non seulement aux risques qui menacent la métropole mais aussi à des risques spécifiques.
Haroun Tazieff, le premier commissaire chargé de la prévention des risques naturels majeurs, au début des années 1980, a donné des risques naturels majeurs la définition suivante : « La menace sur l'homme et son environnement direct, sur ses installations, la menace dont la gravité est telle que la société se trouve absolument dépassée par l'immensité du désastre ».
Tous nos territoires sont susceptibles d'être affectés par des risques naturels majeurs, mais les outre-mer doivent faire face à des aléas particuliers – éruptions volcaniques, cyclones, ouragans, tsunamis – ou à des risques rendus spécifiques par l'insularité et l'étroitesse de ces territoires. Faire face à une inondation majeure compromettant l'alimentation en eau et en électricité peut demander des moyens logistiques qui, parce qu'ils sont inexistants dans certains de ces territoires, doivent donc être acheminés depuis la France métropolitaine. Ces territoires ont pour autre particularité la résilience de leur population qui, ayant largement intégré la culture du risque, a des réflexes de protection collective.
Comment faire face à ces phénomènes dans les territoires ultramarins dans une perspective de réchauffement climatique ? Comment mieux prévenir les conséquences des risques et adapter la politique de prévention pour préserver les vies humaines ?
Notre action est fondée sur trois piliers : connaître, prévenir, faire face. La connaissance des risques et de leur évolution compte tenu du changement climatique suppose de cerner les vulnérabilités et d'anticiper comment un phénomène naturel dangereux peut se transformer en catastrophe. La prévention consiste à réduire les vulnérabilités des territoires les plus exposés ; il faut en particulier veiller à maîtriser l'urbanisation pour que nos concitoyens résident dans les zones les plus sûres, et pour cela adapter le bâti, par exemple en rehaussant les exigences réglementaires en matière de construction en fonction des risques naturels – je pense évidemment à la résistance aux vents cycloniques. Pour faire face, enfin, le ministère contribue à la gestion de crise, qui relève de la responsabilité du ministère de l'intérieur, par la production d'informations en amont et la surveillance à toutes les étapes ; ainsi, nous animons le réseau de surveillance volcanologique et sismologique de Mayotte.
Face au changement climatique déjà à l'œuvre et aux incertitudes qu'il fait peser sur la solidarité nationale en cas de catastrophes naturelles, nous disposons encore de marges de manœuvre pour améliorer notre connaissance et la gestion des nouveaux phénomènes liées à ce changement. Nous menons pour cela une action constante avec les experts de Météo France, de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ; cette liste n'est pas exhaustive.
Nous devons aussi améliorer la prise en compte des risques dans toutes les politiques publiques, particulièrement en matière d'aménagement du territoire et d'urbanisme. Le dialogue avec les collectivités territoriales est donc un élément clé ; le fonds vert, dispositif dont j'ai porté la création, témoigne de la volonté de disposer des moyens permettant ces partenariats.
Enfin, je suis convaincu qu'un citoyen bien informé peut agir rationnellement pour sa propre sécurité en adoptant les gestes qui sauvent et que notre sécurité collective dépend de l'appropriation par les individus de l'ensemble de ces réflexes ou de ces bonnes pratiques. Il en va de notre résilience collective ; de ce point de vue, les outre-mer sont aux avant-postes. Je salue l'inscription dans la loi, en juillet 2023, de la Journée nationale de la résilience en vue d'assurer la préparation de la population aux risques naturels ou technologiques.
Nous avons pour impératif de concevoir et d'appliquer les politiques publiques en tenant compte de la diversité des territoires et donc des spécificités de chaque territoire ultramarin, que ne menacent pas les mêmes risques. C'est ce qui fait l'intérêt de votre mission et c'est ce qui fera, je n'en doute pas, l'intérêt de ses conclusions.