. – Je suis membre du Cercle InterElles, qui promeut la place des femmes dans les entreprises. Je dirige également une société venant en aide aux femmes dans leurs négociations commerciales, pour prendre le pouvoir sur leur avenir financier et économique.
Les discussions de ce matin, extrêmement instructives, m'ont amenée à m'interroger sur le schisme qui existe entre ce que les écoles d'ingénieurs mettent en place pour attirer les jeunes filles et le cadre législatif applicable aux entreprises. Permettez-moi de vous livrer mon témoignage. Ma fille voulait rejoindre une école d'ingénieur. Je l'ai donc accompagnée à moult journées portes ouvertes. Aucune de ces écoles n'a parlé de la place des jeunes filles. Je les ai donc interrogées : quelle est leur politique face à ce public spécifique ? Qu'ont-elles changé dans leur gouvernance par rapport aux événements des écoles du plateau de Saclay ? Que font-elles pour attirer les jeunes filles ? La réponse la plus surprenante a été celle d'un homme qui m'a dit que son école accueillait maintenant 11 % de filles, contre 7 % par le passé. Elle avait également nommé une responsable égalité hommes-femmes, personne que j'ai trouvée et qui n'a pas su quoi me dire. Enfin, cet homme m'a dit : « Que voulez-vous que l'on fasse ? Les jeunes filles ne veulent pas venir, on ne va quand même pas leur filer des points en plus pour qu'elles viennent. » J'en suis restée sans voix.
Je suis étonnée d'avoir constaté, dans les nombreuses écoles rencontrées, que le sujet n'était pas pris à bras le corps. Aline Aubertin fait partie du Cercle InterElles. Elle est très active dans son école. Elle est d'ailleurs l'une des rares femmes à présider une école d'ingénieurs.
Dans le même temps, les entreprises sont de plus en plus poussées par les lois à intégrer des femmes dans leur gouvernance. La loi Rixain, qui est formidable, va les contraindre à augmenter leur taux de féminisation. Comment trouver un équilibre entre ces deux aspects ?
J'ai eu des discussions très intéressantes avec ma fille. Je lui disais que les femmes n'étaient pas nombreuses dans les écoles d'ingénieurs, lui demandant si cela pourrait lui poser un problème. Elle m'a répondu par la négative, indiquant qu'après ses études, elle vaudrait de l'or. J'ai été très surprise, parce que je n'avais jamais eu ce discours avec elle, mais elle a raison. Nous devons montrer aux filles que ce secteur est applicatif.
Lorsqu'elle était petite, ma fille voulait travailler avec les enfants. Je lui ai montré la vidéo d'un jeune enfant déballant une prothèse après avoir eu la main coupée, lui disant qu'elle pourrait aussi s'en occuper de cette manière. Je ne sais pas si son choix d'orientation y est lié, mais elle est aujourd'hui passionnée par la mécanique. C'est dans ce domaine qu'elle veut se diriger. Ainsi, nous devons faire comprendre aux filles que les sciences peuvent être très appliquées, très concrètes. En outre, si elles suivent cette voie, elles seront bankable, auront un poste, pourront faire des tas de choses. Je suis optimiste, même si la situation et le comportement des écoles d'ingénieurs m'ont laissée sans voix.