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Intervention de Rima Abdul-Malak

Réunion du jeudi 28 mars 2024 à 13h00
Commission d'enquête sur l'attribution, le contenu et le contrôle des autorisations de services de télévision à caractère national sur la télévision numérique terrestre

Rima Abdul-Malak, ancienne ministre de la culture :

Non. Je ne me suis pas sentie intimidée. Je n'ai aucun moyen de prouver ce que vous dites : je ne peux donc rien affirmer. En revanche, j'ai vu que les sociétés des journalistes elles-mêmes ont parlé de réponse coordonnée. Des médias ont fait les comptes des plateaux qui m'attaquaient et qui déformaient mes propos. Je le constate.

Ce qui m'intéresse, ce n'est pas tant le commentaire de ce que disent les journalistes – mon respect pour eux me laisse tout de même imaginer que les articles et les éditoriaux sont uniquement guidés par leurs convictions – mais le constat que l'affaire a rebondi politiquement, notamment au Parlement. Il est ainsi intéressant que certaines formules – je serais dans une dérive totalitaire, je voudrais censurer la liberté d'expression – aient été reprises par des parlementaires, notamment le sénateur Reconquête Stéphane Ravier. Une phrase m'a marquée : il me traitait de « ministre de la censure », ajoutant : « La chaîne C8 collectionne, elle, près de 6,7 millions d'euros d'amende depuis six ans pour, disons-le, “non-respect de l'idéologie dominante” ». Le cadre légal des obligations des chaînes devient une idéologie dominante dont il faudrait s'affranchir ! C'est grave. La liberté d'expression ne permet pas d'insulter un député, ou qui que ce soit d'ailleurs : l'injure publique est un délit. La liberté d'expression, ce n'est pas de qualifier d'assassin, de voleur, de violeur les mineurs isolés : dans la République, dans la nation des droits de l'homme, le racisme n'est pas une opinion mais un délit. La liberté d'expression, ce n'est pas non plus de prendre la main d'une chroniqueuse pour la mettre sur son sexe sans l'avoir prévenue et sans avoir recueilli son consentement : cela, c'est, aux termes du code pénal, une agression sexuelle. Je ne cite que trois exemples, au sein de la longue liste de mises en garde, de mises en demeure et autres sanctions prises par l'Arcom à l'encontre de C8 et de CNews.

Si d'autres chaînes avaient connu le même type de dérapages, et reçu les mêmes sanctions, j'en aurais parlé de la même manière. Il se trouve que j'avais regardé : au cours des années précédentes, il n'y a eu aucune intervention de l'Arcom à l'encontre de TF1 et de M6, deux à l'encontre de France Télévisions. À l'époque, j'avais parlé d'une vingtaine d'interventions à l'égard de C8 et CNews, mais je m'étais trompée : on était déjà plus proches de trente ou quarante. Comment se fait-il que deux chaînes forcent si souvent le régulateur à intervenir ? Comment se permettent-elles si souvent de ne pas respecter la loi et leurs obligations ? Que ce non-respect de la loi soit transformé dans le débat public, par un sénateur, en « non-respect de l'idéologie dominante », c'est là le point le plus grave et qui doit être signalé à votre commission d'enquête.

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