Je répondrai d'abord, à l'échelle macro, à votre interrogation sur l'évolution du paysage audiovisuel français et de la TNT au cours des presque vingt dernières années, puis je me recentrerai sur la chaîne Public Sénat.
Il est incontestable que la TNT a été un succès considérable, qui structure aujourd'hui le paysage audiovisuel français. Cette réussite française est due à l'action à la fois des pouvoirs publics et du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), puisque c'est lui qui, à l'époque, a lancé les appels d'offres et retenu les candidatures.
Nous avons en effet complètement changé d'univers – et ce « nous » ne désigne pas seulement les acteurs, dont je faisais déjà partie à l'époque, mais aussi et surtout nos concitoyens, les Français, les téléspectateurs. Nous sommes passés d'un paysage très restreint où, hormis l'offre payante, l'offre gratuite de télévision accessible à tous ne dépassait pas dix chaînes – publiques et quelques privées – à une offre d'une trentaine de chaînes. Ce fut une révolution tant pour l'audiovisuel public français que pour nos concitoyens, qui ont aujourd'hui un choix beaucoup plus large de chaînes tant publiques que privées. Ainsi, avant le lancement de la TNT, il n'existait à ma connaissance qu'une seule chaîne d'information, LCI, qui était en outre payante ; or les chaînes d'information accessibles à tous nos concitoyens sont devenues nombreuses aujourd'hui, puisque nous en avons, selon les décomptes, entre quatre et six – j'en exclus les chaînes parlementaires.
Nous ne considérons pas que Public Sénat entre dans cette catégorie. Nous ne sommes pas une chaîne d'information en continu, diffusant de l'information vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et n'avons pas de rendez-vous de journaux télévisés. Cela ne signifie évidemment pas que nous ne traitons pas l'actualité – elle représente même une grande partie de nos programmes – mais nous la traitons assez différemment des chaînes d'information. Nous nous consacrons majoritairement à l'actualité parlementaire. Les chaînes d'information en traitent aussi, mais ce n'est pas leur mission, alors que c'est la nôtre. Nous donnons donc une visibilité beaucoup plus grande, en termes de volume et d'importance, au travail du Parlement, que ce soit dans sa mission législative ou dans sa mission de contrôle telle que vous l'exercez aujourd'hui.
Nous sommes pourtant aussi une chaîne d'actualité, mais nous traitons celle-ci dans un esprit de pédagogie et de profondeur, en revenant sur certains de ses éléments. La loi du 30 décembre 1999 qui a créé nos deux chaînes a eu l'intelligence de définir leur mission en en faisant des chaînes parlementaires, mais aussi chargées d'apporter aux citoyens ce qui, dans le domaine de l'audiovisuel, peut leur être utile.
Nous sommes donc à la fois des chaînes parlementaires et des chaînes citoyennes – bien sûr publiques. Cela me semble expliquer la différence entre la ligne éditoriale et les contenus que nous proposons et ceux de la plupart des autres chaînes de la TNT, en particulier des chaînes d'information.
Pour ce qui est de la stratégie de nos chaînes, de notre différenciation et de notre utilité, sans vouloir me résumer à un slogan publicitaire, je citerai toutefois la signature adoptée par Public Sénat depuis quelques mois : « Regarder la différence ». Du fait de leur mission de chaînes parlementaires, qui est unique, des autres missions que leur assigne la loi et du travail que nous effectuons, nos chaînes réussissent vraiment – du moins en ont-elles l'ambition – à proposer des offres différentes de la plupart de celles qu'on peut trouver sur la TNT.